Un rêve de petite fille, devenu réalité : « J’ai vécu toute ma vie pour ça… J’ai toujours dit à ma mère : je veux porter le maillot de l’équipe de France. Même à l’école, quand ils nous demandaient ce qu’on voulait faire, moi, j’écrivais : footballeuse professionnelle. »
L’actualité fait la part belle à Wendie Renard. Élue en octobre « défenseure de l’année 2019 » par l’UEFA, la joueuse martiniquaise, nommée pour « The best FIFA Football Awards », dont le résultat des votes ouverts au public sera publié le 17 décembre, compte depuis la semaine au rang des « onze personnalités qui font le plus avancer le foot féminin ». Les The Best FIFA Football Awards sont des récompenses remises chaque année, depuis 2016, par le conseil d’administration de la FIFA.
Une autobiographie intitulée « Mon étoile » et une interview dans la presse
Avec treize titres de Championne de France, six Ligues des champions et plus de cent sélections en Équipe de France, il n’y a plus à présenter Wendie Renard sur le plan sportif. De par son palmarès, son expérience, sa notoriété, elle est probablement la plus grande joueuse française actuelle. Et malgré cela, on connaît assez peu sa vie et son parcours. Heureusement, grâce à son autobiographie, écrite en collaboration avec Syanie Dalmat et parue aux éditions Talent Sport, la capitaine de l’Olympique Lyonnais remédie à ce manque. C’est le volet intime de sa vie que la footballeuse martiniquaise livre dans ces pages joliment intitulées Mon étoile. Une vie faite d’obstacles, mais pleine de persévérance et de foi. Elle a souhaité raconter son parcours, et en se racontant adresser un message aux jeunes générations.
Qu’on soit passionné de football ou non, il faut lire ce livre comme une réelle leçon de vie et de résilience. Car si Wendie évoque ses « faits d’armes », son doublé en ouverture de la Coupe du Monde 2019, ou encore son but gag contre son camp – le seul de sa carrière – lors de la deuxième rencontre contre la Norvège, elle nous fait aussi confidence de son enfance sur l’île antillaise, nous confie sa relation fusionnelle avec la Martinique, comme avec le créole, dont elle use au fil des pages. Nous la découvrons par un récit précis et documenté, accompagné des témoignages de ceux qui la connaissent le mieux.
Son histoire avec Lyon
Wendie Renard est née en Martinique, l’île où elle a passé son enfance et joué ses premiers matches de football. Très attachée à son pays, où elle retourne dès qu’elle le peut, elle a pourtant noué une relation très forte avec la ville de Lyon. Une ville où elle est arrivée un beau jour seule, en train, encore adolescente. Elle venait alors d’apprendre qu’elle n’était pas reçue à Clairefontaine et Jocelyn Germé, conseiller technique de Martinique, parvint à lui décrocher un essai du côté de l’Olympique Lyonnais. Elle découvrit alors une ville qu’elle ne quitterait plus. Tout au long de son récit, on sent un attachement à la capitale rhodanienne, où elle a grandi en tant que femme mais où elle est surtout devenue l’une des meilleures footballeuses du monde. À deux reprises, elle a failli la quitter, mais celle qui croit aux signes du destin est finalement restée. Et il est passionnant de lire qu’à chaque fois, cela s’est joué à d’infimes détails. L’histoire de Wendie Renard aurait pu aussi bien s’écrire ailleurs et pourtant, c’est à l’OL qu’elle a choisi de continuer à s’épanouir. Et cette relation particulière avec la ville et son club, c’est peut-être Jean-Michel Aulas, qui la résume le mieux dans le livre : « Malgré ses origines antillaises, elle incarne Lyon […]. Mon idée c’est qu’elle ait un parcours comme Paolo Maldini au Milan et c’est possible car son histoire s’écrit au-delà du foot. Je le ressens profondément, c’est quelqu’un de vraiment bien. »
Une immersion au cœur de l’Équipe de France
C’est un lien très puissant qui unit Wendie Renard à l’Équipe de France. Elle a d’ailleurs conservé précieusement son premier maillot porté en Équipe jeunes. Représenter son pays est une fierté qu’elle met largement en avant dans son livre. Et pourtant, tout n’a pas toujours été simple. Si sa trajectoire avec l’Olympique Lyonnais va crescendo, son parcours avec les Bleues est plus chaotique. Repérée par les dirigeants nationaux dès son arrivée à l’OL, elle a longtemps été présentée comme une future star de l’équipe, ce qu’elle est d’ailleurs devenue, a gravi les différents échelons jusqu’à porter le brassard de capitaine d’une équipe qu’elle a accompagnée dans les plus grandes compétitions internationales, jusqu’aux Jeux Olympiques – le rêve de tous les sportifs.
Pourtant, à l’arrivée de Corinne Diacre à la tête de l’équipe, le monde de Wendie Renard s’effondre. Elle se voit d’abord dépossédée du brassard de capitaine et même attaquée sur son niveau jugé insuffisant par la sélectionneuse tricolore. Puis au fil des mois, la relation des deux femmes se tend. Corinne Diacre allant même jusqu’à tancer publiquement sa joueuse dans les médias pendant le dernier Mondial – notamment après son but contre son camp lors du deuxième match de poule. Wendie Renard a très mal vécu ce manque de considération. Elle, qui a toujours respecté ce maillot et ses valeurs mais également le staff et ses coéquipières, semble avoir vraiment souffert pendant le dernier Mondial à domicile, qui pourtant aurait pu devenir l’un des plus beaux moments de sa carrière.
Malgré tous ces épisodes malheureux, le livre comporte également de nombreux jolis souvenirs avec les Bleues. Mention spéciale aux premières pages où l’on suit Wendie Renard pendant les quelques heures précédant l’ouverture de la Coupe du monde. Une immersion inédite qui ravira tous les curieux des dessous du football !
Un mental à toute épreuve
Si Wendie Renard semble posséder un mental à toute épreuve, résistant aux remarques racistes parfois entendues sur les stades – « tu te dis que ce n’est pas possible. Tout ça parce que je suis métisse, parce que mes cheveux sont crépus, on me compare à un singe. On perd la tête ! C’est pas facile mais tout ça me renforce » –, c’est que depuis toujours, elle a su se relever des afflictions les plus profondes. Dans son récit, elle se livre à ce sujet comme jamais. Notamment sur la maladie et la disparition de son papa, – un père à qui elle pense dès qu’elle entend la Marseillaise –, alors qu’elle n’était encore qu’une petite fille. Très proche de celui-ci, elle raconte tous les moments délicieux qu’elle a passés avec lui avant de le voir s’affaiblir. Pourtant, elle ne conserve de ses souvenirs que la force qu’il a su lui transmettre. Et toute sa vie, elle sera guidée par les dernières paroles échangées dans sa chambre d’hôpital. Wendie Renard n’avait beau être âgée que de quelques années quand ce drame est survenu dans sa vie, elle a pourtant su se relever et se fixer l’objectif d’aller toujours plus haut. Elle le résume d’ailleurs très bien : « Tout le monde perd quelqu’un un jour ou l’autre, ensuite, il s’agit de choisir de quelle manière on va réagir. Soit on sombre, soit on relève la tête, on avance et on se bat ». Elle rend hommage aussi à sa mère, à sa langue créole, « une langue forte, une partie de moi-même », à son pays, se disant fière d’elle, de ses sœurs, de sa mère. « C’est mon modèle, elle est tout pour moi. Après la mort de mon père, elle a tout fait pour nous. Financièrement ce n’était pas facile mais c’était la première, s’il y avait des titiris, à les pêcher pour les vendre après le boulot. »
Mon étoile est un très beau récit, qu’il faut lire si l’on veut comprendre qui est vraiment la capitaine de l’Olympique Lyonnais. Il ne s’agit pas d’un témoignage de sportive qui raconterait les faits majeurs de sa carrière. Ici, Wendie Renard se met à nu comme elle ne l’avait jamais fait. Et les différents témoignages de ses proches définissent, avec plus de profondeur encore, sa personnalité singulière et son style.