Merci à Martine Larbat pour ses explications lors des visites de monastères tibétains, merci à Emmanuel Agletiner pour l’organisation de ce voyage et son dévouement de tout instant et merci au groupe majoritairement féminin qui m’a fait évoluer dans une douce ambiance. Et voici maintenant quelques réflexions, pardon des «ressentis», que ce voyage a suscité(e)s
Octobre 2018
Le titre ne doit pas induire en erreur. Si le voyageur au contact d’une civilisation profondément différente de la sienne a pris conscience de son identité culturelle et du fait qu’il considère la pensée conceptuelle comme un outil essentiel de la connaissance, il est en même temps très sensible au symbolisme qui ouvre des portes sur les mystères de l’existence en alliant le sensible et le réflexif. Inversement, la profusion des symboles dans un temple tibétain lui a semblé comme un voile qui a la fois cache et révèle une réflexion et des méthodes de méditation depuis 2500 ans dont témoignent les immenses bibliothèques du pays et dont les moines étudient, analysent patiemment les ouvrages. D’ailleurs les paroles inaugurales du Bouddha historique telles que transmises par la tradition sont d’une telle clarté évidente mais jamais exprimée auparavant que l’on pourrait les comparer aux premières phrases du « Discours de la méthode » de Descartes: geste inaugural d’une nouvelle pensée. Constatation : la vie est souffrance et confusion, l’origine de la souffrance est la croyance au Moi qui est illusoire, détruire le Moi c’est s’ouvrir à la vie en vérité et à la compassion pour tous les êtres.
On voit par cette démarche initiale que le Bouddha historique ( Shakyamuni, 5e siècle avant l’ère commune) né en Inde, se détourne des préoccupations métaphysiques et du foisonnement symbolique de sa civilisation pour se livrer à une réflexion radicale sur l’existence humaine et les conditions de sa guérison. C’est un psychologue et un thérapeute que j’oserais comparer à Freud qui dans sa pratique traque les névroses ( les illusions du Moi) mais avec des différences essentielles, car d’une part le psychanalyste s’appuie sur le langage et laisse au patient la liberté de trouver son chemin de vie ( langage et liberté sont deux marques, deux horizons de la culture occidentale), d’autre part le sage indien voit la libération dans la méditation au-delà des mots et des concepts qui sont pour lui encore des illusions, méditation qui fait pénétrer le disciple dans la perception sensible de la vacuité de toute chose. C’est sur cette notion que se situe le grand clivage entre l’Orient et l’Occident; pour comprendre la Chine et l’Inde, l’Occidental doit se libérer de son conditionnement culturel et sans se renier ( car ce serait alors un mimétisme artificiel) prendre conscience de l’écart ( notion chère au sinologue François Jullien) entre sa propre culture et celle de l’Orient qu’elle soit indienne ou chinoise. En effet, la notion chinoise du Dao, de l’origine vide de toute chose est parfaitement en concordance avec celle de la vacuité bouddhiste mais cependant avec une différence dans les conclusions car -me semble-t-il – le bouddhisme conduit à une morale ( celle de la compassion), le taoïsme conduit à une stratégie de vie au milieu de l’impermanence de toutes choses dans le jeu des énergies yin et yang … et ce dernier point convient mieux au voyageur !
Le voyageur ayant lu quelques livres sur le Bouddhisme ( notamment l’excellent livre d’Alexandra David-Neil « Le Bouddhisme du Bouddha ») pouvait concevoir qu’il s’agit à peine d’une religion, plutôt d’une sagesse, d’une religion sans dieu et sans imaginaire. Or, ce fut exactement le contraire qu’il découvrit dans le premier temple qu’il visita à Labrang : une profusion d’images et de personnages, l’éclat de l’or et des couleurs vives, toute la beauté du monde sensible. Le voyage avait commencé à Xian, ancienne capitale du premier empereur fondateur d’un empire chinois unifié où l’on peut contempler sa célèbre armée de terre cuite, ville qui fut le point de départ de la Route de la Soie qui allait jusqu’au Moyen Orient. C’est à cause d’elle que vit à Xian une importante communauté musulmane ( les Hui) et une mosquée de style chinois. Elle symbolise le fait qu’il n’y eut jamais en Chine de guerre de religion, mais des influences réciproques ou du moins une cohabitation harmonieuse. En allant vers l’Ouest, dans la province du Qinghai on découvre tantôt des villages dotés d’une mosquée, tantôt d’autres dont le temple-monastère de style tibétain dénote la présence d’une nombreuse population de cette ethnie dans cette province chinoise, et il y a des villages où l’on trouve le temple bouddhiste non loin de la mosquée. Mais à Labrang, ce fut une première plongée dans le monde purement tibétain : une large avenue calme bordée de maisons basses et de boutiques où flânent de nombreux moines vêtus de leur robe couleur rouge lie de vin. Au bout de l’avenue le monastère se signale par la rangée de moulins à prière que font tourner dès avant le lever du soleil les habitants en murmurant de longues litanies. Le monastère constitue en fait tout un quartier de la ville, c’est en quelque sorte une cité universitaire composée de temples proprement dit, de cours, d’habitations des moines, de salles d’enseignement, de réfectoires, de salles de musique … et d’une imprimerie traditionnelle où les textes sont gravés sur des planchettes de bois puis celles-ci sont pressées sur un papier fabriqué à base d’herbes médicinales qui permettent une longue conservation du papier et donc des textes. Le voyageur retrouvera partout dans le Tibet proprement dit ( la région autonome du Tibet, annexée à la Chine) cette alliance de religiosité, de culture et de vie sociale qui dénote une vielle civilisation profondément enracinée qui ne craint pas quelques percées de modernité. Le moine qui expliquait au voyageur le fonctionnement de l’antique imprimerie se servait aussi de son téléphone portable !
Le monastère de Labrang étaient en travaux lors de notre passage, on réparait ou reconstruisait un bâtiment détruit. Ce fut une litanie tout au long de nos visites durant le voyage. « Ce monastère a été détruit par les gardes rouges durant la Révolution Culturelle. Il est maintenant reconstruit grâce en partie aux subsides de l’état chinois, en partie par les dons de la population ». Il est difficile de se faire une image de la somme de destructions et pire encore des meurtres et des tortures que subit la population, moines et laïcs, depuis l’annexion du Tibet par la Chine. On estime à un million le nombre de victimes. Il s’agit bien d’un génocide passé sous silence. Aucun mémorial ne permet le deuil de ce massacre. On peut imaginer que chaque Tibétain, chaque Tibétaine prie en silence devant le Bouddha de la compassion pour l’âme de ses proches, victimes de l’occupation chinoise Il est possible que le bouddhisme permette une gestion plus radicale du deuil que ce n’est le cas dans les monothéismes, puisque de toute façon la vie est souffrance. Le voyageur a essayé timidement d’interroger le guide tibétain du groupe, un homme cultivé très sympathique. Il ne reçut presque qu’un sourire amèrement ironique, simplement l’espoir que le peuple tibétain et sa culture survivront. Comme dans tout régime autoritaire, donc d’oppression de la parole libre, il y a les dits et les non-dits. Ces derniers sont abyssaux, les premiers ne sont qu’un signe discret mais qui manifestent si on sait les lire la présence de « l’abyssalité ». Les moyens modernes de surveillance permettent de contrôler partout et toujours les paroles et les comportements, y compris dans un bus. Il n’est plus besoin de mettre des policiers partout, mais il y en a cependant beaucoup, dans les villes, aux abords des temples, sur les routes. Si l’on ignore ou feint d’ignorer cela, la capitale Lhassa donne l’impression d’une ville vivante, sereine, s’adonnant joyeusement au commerce et à la fréquentation des temples.
Le gouvernement chinois n’a pas fait amende honorable, aucune trace d’excuse ou de repentir. Mais comme partout en Chine, il subventionne les communautés religieuses du moment qu’elles n’interviennent pas dans le champ politique et font allégeance au régime. D’autre part , la richesse du patrimoine culturel tibétain est un avantage touristique. En ce domaine, le gouvernement actuel semble aux yeux du voyageur en parfaite concordance avec la tradition millénaire de la Chine qui n’est pas un état national mais un ensemble multiethnique et multiculturel où les spécificités des minorités sont préservées du moment qu’elles se plient aux décisions du pouvoir central. On peut donc imaginer un Tibet sinisé où pourtant la spécificité tibétaine sera préservée. Comment peut-il en être autrement ? Aujourd’hui 2,7 millions de Tibétains vivent dans la Région Autonome du Tibet, mais la population totale compte 8% de Han (l’ethnie principale de la Chine) et cette population ne cesse de progresser ! 3 millions vivent dans les provinces chinoises voisines du Tibet, et 150000 vivent en exil à travers le monde en Inde, en Europe ou aux USA ( le voyageur s’appuie sur les chiffres donnés sur internet qui divergent à certains égards des informations du guide) . Il est stupéfiant de voir comment cette diaspora s’est adaptée à des contextes sociaux et culturels totalement différents et comment les Maîtres tibétains transmettent des disciplines spirituels à des Occidentaux déçus et déboussolés par leur propre culture d’origine. Le symbole en est bien sûr le Dalaï-Lama, chef politique et spirituel des Tibétains en exil en Inde tandis que le Panchem Lama, chef uniquement spirituel,âgé de 37 ans vit à Pékin où il est sensé faire des études. Les deux semblent vénérés par les Tibétains, ils sont les symboles vivants de la permanence de leur identité.
Dans un temple, le voyageur admira la très belle statue de la princesse chinoise Wencheng qui au 7e siècle fut mariée au roi du Tibet – en ce temps les relations étaient bonnes entre le Tibet et la Chine. Elle contribua beaucoup au rayonnement du bouddhisme tibétain et elle fut déifiée. Lors des événements de la Révolution culturelle, des gardes rouges tibétains vinrent détruire la statue, mais l’un deux vit que la déesse pleurait et il pria ses camarades d’interrompre la destruction. C’est alors que le chef du groupe cria : « Eh bien, coupez la tête de cette déesse pleurnicheuse « .
De la problématique politique du Tibet ( pas plus que du rôle inférieur de la femme dans le monachisme bouddhique!) il ne fut jamais question dans le groupe qu’accompagnait le voyageur, constitué essentiellement de femmes qui suivent une formation à la méditation avec Martine Larbat à Rennes. Son livre « Relier corps et esprit » qui est très clair et bien structuré, s’appuie à la fois sur le taoïsme chinois et sur le bouddhisme tibétain pour mettre en valeur le « ressenti » qui unit corps et esprit. Que le ressenti, autrement dit en termes spinozistes les « affects » soit l’essence même de l’homme qui est être de désir, le rationaliste spinoziste approuvera. Mais les affects ne sont pas nécessairement source de vérité, au contraire bien souvent sources d’erreurs et d’illusions. Il faut que les affects soient « réfléchis » aux deux sens du terme par la raison, par l’usage de concepts clairement définis. Cette conquête de la « lumière » provoque alors en l’esprit une nouvelle puissance, un nouvel affect qui est la Joie. Le voyageur ignorant presque tout de la littérature bouddhiste ne sait pas comment cette tradition résout ce problème. Mais il suppose que cette immense littérature est une réflexion sur les présupposés établis par Bouddha, donc fait usage de concepts ( qui certes doivent s’effacer dans la pure méditation). D’ailleurs, il a perçu un indice lorsqu’il assista dans un monastère à un débat rituel entre jeunes moines : ils se groupent deux par deux, l’un interroge, l’autre donne sa réponse, résultat de sa réflexion et de son savoir des textes. Cette scène rappelait quelque peu l’usage de la dialectique quand Socrate interrogeait ses disciples.
Il y a une erreur énorme à éviter quand on aborde la notion de « désir « chez Bouddha, erreur qu’a commis sans doute Schopenhauer quand il a interprété le bouddhisme comme une doctrine pessimiste et nihiliste qui vise à l’extinction de la vie. Les désirs selon Bouddha, ce sont les désirs du Moi, l’égoïsme, l’accaparement aux dépend des autres, la poursuite absurde des plaisirs etc … Cette ronde des désirs, il l’appelle le « samsara » , la vie ordinaire, source nécessairement de souffrance. Le « nirvana », ce serait un état psychique ouvert à tous les êtres, délivré de la souffrance narcissique, donc le bonheur, but ultime de l’âme humaine, réconciliation avec la vie !Le nirvana serait alors l’accomplissement du Désir, l’énergie fondamentale de l’âme humaine (et non des petits désirs du moi) Samsara et nirvana seraient les deux faces d’une même médaille, celle de la vie, l’une dans l’obscurité, l’autre dans la lumière de la perfection humaine, la sagesse. Nous ne sommes pas loin du 3e genre de connaissance décrit par Spinoza dans l’Ethique, le premier genre étant la connaissance partielle et fausse selon les affects primaires, le second la connaissance réflexive, et le troisième la connaissance intuitive du monde et de son unité, l’extase existentielle, l’aboutissement du désir d’exister. Que cette recherche soit longue et difficile, qu’elle soit faite d’une patiente « ascèse » (exercices), Bouddha et Spinoza nous en avertissent.
Ce que le voyageur voit dans les temples est l’expression de 2500 ans de spéculations et de pratiques de méditation allant du Yinayana ( Petit véhicule) au Mahayana ( grand véhicule), au Vajrayana (Véhicule du diamant) pratiqué au Tibet et culminant dans le tantrisme que personne hormis les pratiquants ne connaît puisque c’est un enseignement et des pratiques secrètes, sans doute influencé par par le bön, la religion originelle du Tibet et le chamanisme. Il est donc évident que le voyageur admire les tanka et les mandala sans trop en saisir le sens, se réjouissant seulement de leur aspect esthétique. Il est frappé par une multiplicité de Bouddha sur certains tanka. Cela il le sait : le Bouddha Shakiamuni n’est qu’un avatar ( une apparition sur terre) de la bouddhéité ( l’éveil) qui a une dimension cosmique, il y eut une infinité de Bouddha avant lui et il y en aura une infinité après lui. On voit en particulier une grande statue qui représente le Bouddha du Futur. Il y a donc dans le bouddhisme une pensée du temps historique et de l’avenir de l’humanité, ce qu’on nomme en Occident une eschatologie – un temps orienté vers un achèvement ( la Jérusalem céleste), mais peut-être bien que dans la grande et profonde vision bouddhiste, il n’y a pas de fin comme il n’y a pas de commencement. D’autre part, il y a dans le temple beaucoup de statues représentant le fondateur et les grands personnages de la lignée à laquelle se réfère le monastère. C’est en quelque sorte la mémoire de l’histoire de la lignée, un peu comme pour les Français le Panthéon dédié à la mémoire des grands hommes ( et depuis peu des grandes femmes!), la patrie reconnaissante.
Si l’on a compris que le Bouddhisme est une religion sans Dieu, on peut être surpris de voir dans un temple autant de représentations de divinités masculines et féminines , de génies protecteurs à l’aspect menaçant. Ce qui est absent, c’est le Dieu créateur – le monde n’a ni commencement, ni fin- Le monde des dieux est l ‘émanation de l’esprit de l’homme, un support à la méditation. Les dieux comme les hommes vivent et meurent à une autre échelle que celle de la vie humaine. Le bouddhisme , étant né en Inde, a réintégré en son sein un certain nombre de représentations religieuses de l’univers hindouiste. Dans le fond, le temple tibétain est encore une « maya », un monde sensible illusoire qu’il faut dépasser dans la vacuité.. Si le geste initial du Bouddha a un aspect « protestant » ( purification, retour à l’essentiel), l’histoire du bouddhisme et particulièrement le bouddhisme tibétain exprime le « retour du refoulé », le retour à l’image comme support de la méditation et de la prière. Regardant les humbles fidèles s’adressant aux déités et récitant leur mantra, le voyageur ne sait ce qui se passe en eux, s’ils croient à la réalité vivante d’une déité ou s’ils s’adressent au fond de leur âme. Peut-être que le peuple a besoin d’images et d’une ferveur religieuse qui va jusqu ‘à l’excès : beaucoup de fidèles se prosternent à l’entrée du temple et quelle prosternation ! Ils se jettent à terre bras en avant, ils sont allongés sur le sol à plat ventre puis se redressent. Il faut parait-il exécuter mille fois cette prosternation. Mais c’est sans doute un nombre symbolique pour dire au fidèle qu’il n’en fait jamais assez pour son salut !
L’idée la plus difficile à comprendre dans le bouddhisme est celle de la réincarnation. Du fait que le Moi n’est qu’une illusion et qu’il n’est fait que d’un agrégat de choses diverses, ce n’est pas un sujet qui traverse la mort et se réincarne mais plutôt un composé d’énergies qui se dissolvent et se réinvestissent dans la vie cosmique selon la qualité de ces énergies. Pour le croyant bouddhiste, la réincarnation n’est pas un espoir mais une malédiction car il éprouve l’angoisse de se réincarner dans un être inférieur et de passer par les enfers. L’espoir, c’est de ne pas renaître mais d’entrer dans le domaine de la bouddhéité, de la compassion infinie qui caractérise l’éveil. C’est alors que l’éveillé peut décider par compassion de revenir à la vie terrestre pour sauver tous les êtres. Ces êtres d’exception sont les Bouddhas ou les grands maîtres de la tradition. Ainsi chaque Dalai Lama après sa mort est censé se réincarner en un enfant que l’on va chercher selon un processus particulier et secret au fin fond de la campagne tibétaine.
Il est vrai que ces conceptions ésotériques laissent le rationaliste un peu pantois ! Il s’en tiendrait volontiers à l’opinion de Spinoza : « Le sage ne pense à rien moins qu’à la mort.Sa philosophie est une philosophie de la vie et non de la mort ». Donc la mort n’est rien, la vie est tout et c’est dans la vie que l’esprit éprouve l’éternité, l’éternité de l’instant et celle de la pensée adéquate à ce qu’est le monde. Malgré tout, la pensée de la mort taraude le voyageur : qu’est-ce qui survivra de moi ? Il se voit comme un composé d’énergies issues du cosmos – le cosmos lui-même est en son fond pure énergie. Ces énergies se sont dispersées au cours de sa vie, positives ou négatives, elles ont changé un tant soit peu le monde. Ce qui survit de lui dans des réalisations, dans des actes généreux, dans des paroles efficaces et dans la mémoire de certain(e)s, c’est là son éternité, fragile éternité.
Le voyageur donc visita beaucoup de temples mais nulle part il n’eut la même émotion que dans le grand temple de la nature :
« La nature est un temple où de vivants piliers
laissent parfois sortir de confuses paroles » (Baudelaire).
La nature au Tibet est grandiose : de vastes espaces qui semblent illimités, des montagnes arides
traversées par un grand fleuve, le Brahmapoutre, presque pas de présence humaine mais ici et là des troupeaux de yaks et au-dessus un ciel lumineux, éclatant d’un bleu profond. Un jour, le voyageur découvrit un paysage inoubliable : en contre-bas des montagnes, un immense lac naturel bleu turquoise sous le ciel bleu clair immaculé, un lac sacré bien sûr. Silence … l’absolu indicible. Le nirvana … un bref instant !
Michel Pennetier, novembre 2018
Réponse de Martine Larbat :
Merci, Michel, de partager avec nous impressions et réflexions.
Si tu veux bien, je te livre les miennes concernant 2 points. Je surligne en jaune l’extrait de ton texte..
Que le ressenti, autrement dit en termes spinozistes les « affects » soit l’essence même de l’homme qui est être de désir, le rationaliste spinoziste approuvera. Mais les affects ne sont pas nécessairement source de vérité, au contraire bien souvent sources d’erreurs et d’illusions. Il faut que les affects soient « réfléchis » aux deux sens du terme par la raison, par l’usage de concepts clairement définis. Cette conquête de la « lumière » provoque alors en l’esprit une nouvelle puissance, un nouvel affect qui est la Joie.
Je ne pense pas que l’on puisse assimiler ce que Tarab Tulku appelait « ressenti » aux affects de Spinoza.
Qui dit affect dit coloration émotionnelle.
Selon Tarab Tulku, il y a plusieurs niveaux de ressentis :
-physiques, liés à la perception par les 5 sens (pas d’émotion)
-énergétiques, liés au corps énergétique et à ses 5 sens énergétiques (pas d’émotion)
-et les ressentis liés à l’esprit :
Parmi ces derniers il y a ceux qui sont d’ordre psychique donc teintés émotionnellement
et ceux qui concernent la nature de l’esprit qui se situe au-delà de notre bazar émotionnel. C’est ce niveau, qu’au-delà de tout concept, on tente de « ressentir » en méditation. Il peut en naître la Joie qui, quand elle est sans contraire, quand elle est inconditionnelle n’est pas de l’ordre de l’émotion qui, elle, est toujours duelle.
: « Le sage ne pense à rien moins qu’à la mort.Sa philosophie est une philosophie de la vie et non de la mort ».
Pour les bouddhistes tout est Vie. La Vie est un courant fait de naissances et de morts. Ainsi la mort n’est pas le contraire de la vie mais le contraire de la naissance.