Dans un numéro commémoratif en kiosques ce samedi, Charlie Hebdo dresse quatre ans après l’attentat le portrait sombre d’une société française « anti-Lumières ».
La couverture de ce numéro commémoratif de Charlie Hebdo fait écho à la une du numéro historique du 14 janvier 2015 : sur fond noir, un évêque et un imam soufflent sur la flamme d’une bougie, dont la lumière éclaire le titre de l’époque, « Tout est pardonné ». « Ce ne sont pas seulement nos histoires personnelles (qu’on oublie), c’est aussi ce qu’a signifié ce qui nous est arrivé. On a l’impression qu’on tourne le dos à ça, alors qu’à notre avis ces phénomènes de réactions rétrogrades sont toujours présents, encore plus qu’il y a 4 ou 5 ans », a expliqué à l’AFP Riss, directeur de la rédaction et auteur du dessin de une.
Lire aussi – Luz au JDD : « A Charlie Hebdo, tout le monde m’attendait, même les morts »
« Tout est devenu blasphématoire », déplore Riss
« Ce n’est plus uniquement une hostilité qui vient d’extrémistes religieux mais aussi d’intellectuels », s’inquiète-t-il. Dans un édito coup de poing, intitulé « Vous êtes encore là? », il déplore que « depuis quatre ans, la situation à l’égard du totalitarisme islamiste n’a fait que se dégrader. Comme la créature d’Alien qui pond ses oeufs sans interruption, le blasphème a fait des petits. […] Tout est devenu blasphématoire ».
Hormis l’édito, le numéro spécial fait peu mention de l’attentat du 7 janvier 2015 au cours duquel deux islamistes radicaux avaient tué 12 personnes (11 dans les locaux du journal, qui a depuis déménagé), parmi lesquelles des figures emblématiques comme les dessinateurs Cabu, Wolinksi, Honoré, Tignous, l’ex-directeur de la rédaction Charb et l’économiste Bernard Maris.
Des « obscurantistes » qui célèbrent l’anniversaire de l’attentat
Sur la double page centrale, un dessin de Juin montre des « obscurantistes » en train de célébrer l’anniversaire de l’attentat : on y voit notamment le Pape, plusieurs membres de la famille Le Pen, Dieudonné, Eric Zemmour, Donald Trump, l’animateur TV Cyril Hanouna ou encore l’écrivain Michel Houellebecq, que l’hebdo avait caricaturé en une du numéro du 7 janvier 2015.
« Les frères K. ont essayé d’éteindre les lumières. Ils ont failli réussir, mais ils ont tout de même oublié quelques lampes »
« Que le dernier qui s’en va éteigne les Lumières en partant, même s’il n’y voit rien… », écrit le journaliste Philippe Lançon, primé cette année pour Le Lambeau, livre dans lequel il raconte sa reconstruction après l’attentat. « A Charlie, dans notre modeste petite maison francophone, les frères K. ont essayé d’éteindre les lumières, avec et sans majuscule, en entrant puis en sortant. Ils ont failli réussir, mais ils ont tout de même oublié quelques lampes », poursuit-il, dans un billet intitulé « Il faudrait changer les ampoules »…
Lire la Suite & Plus => Le JDD.fr