— Le n° 361 de « Révolution Socialiste », journal du G.R.S. —
—Tribune libre de Philippe Pierre-Charles (GRS)—
Le premier et plus indiscutable mérite du RPPRAC (le R et ses camarades) est d’avoir osé ! D’avoir pris ses responsabilités face à la vie chère, aux détresses et à la colère que celle–ci génère. De s’être ouvertement dressé contre les profiteurs qui nous mènent en bateau, à travers leurs déclarations sans conséquence ou leur « commission » préfectorale de pure consultation.
Les centaines de combattant·e·s contre la vie chère présent-e-s dans la rue ce dimanche 1er septembre, à l’appel du RPPRAC, laissent penser que les mots d’ordre lancés et répétés depuis juillet, ont rencontré un écho réel dans la population.
Nombreuses sont, dans le peuple, les personnes qui approuvent cette mobilisation, sans forcément s’y joindre activement (pour diverses raisons). L’action qui débute avec le mois de septembre, est une interpellation objective des forces dont la fonction et la nature est de défendre sans faillir les intérêts, les aspirations, la dignité et le droit à la vie du plus grand nombre.
On peut certes discuter à perte de vue du ton de l’interpellation, de la tactique à l’égard des syndicats et « des politiques » mis dans le même sac, comme de la stratégie revendicative choisie. Il n’empêche que la question posée est simple et la réponse évidente. le mouvement ouvrier et politique ne peut se contenter d’osciller entre l’observation attentiste, la sympathie platonique et la susceptibilité sur les formes.
Le mouvement actuel repose, à sa manière, un problème que février 2009 n’avait résolu, ni de façon complète, ni de façon durable. À l’évidence non ! Il y a donc urgence que toutes ces forces prennent à leur tour leurs responsabilités.
Celles et ceux qui ont sonné le tocsin ont raison, mais n’ont aucune récupération à craindre, que les autres forces entrent dans la lutte. La tâche est trop immense pour la division et la concurrence.
Nous sommes bien placés, après 2009, pour savoir que les solutions durables exigent des transformations radicales qui ne viendront jamais sans un rapport de forces construit dans la lutte, sans illusion bavarde, sans croyance naïve dans la sagesse des multiples profiteurs de la vie chère, des bas salaires, du chômage, des minima sociaux minables, des services publics en ruines.
Le monde du travail qui a le pouvoir de bloquer le système, le peuple en général doit prendre en mains des questions dont son sort dépend. Le mouvement ouvrier syndical et politique peut et doit se rencontrer en urgence pour agir dans cette direction.
20 à 25 % sur 2500 produits d’ici la fin de l’année ?
Beaucoup rêvent déjà de cette promesse conjointe de la grande distribution et de l’État.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, qu’on nous permette un constat qui prêterait à rire si celui-ci ne portait sur la misère des classes exploitées. Les prometteurs d’aujourd’hui sont unanimes à vilipender février 2009. Ils ont même réussi à contaminer bien des gens du peuple qui reprennent naïvement ou consciemment leurs discours mensongers et fort intéressés.
Alors livrons–leur le titre de France-Antilles du 13 mars 2009. En gros titre le journal annonce la publication en page interieure de la « nouvelle liste des prix » : 2585 articles avec une baisse d’au–moins 20% des prix !
Au–delà de la similitude de la promesse d’aujourd’hui, des questions viennent à l’esprit. Pourquoi la baisse d’hier a t’elle disparu ? Quelle garantie que le cirque ne se reproduira pas ? Qui définira la liste ? Car contrairement aux propos légers de certains, les listes d’hier étaient négociées par le mouvement et non octroyées. Des brigades syndicales de verification de l’application de l’accord ont fonctionné tant que la qualité de négociateur du mouvement était imposée par le rapport de forces.
La baisse promise aujourd’hui n’aura de réalité durable qu’avec la réalisation de ces deux conditions : négociation de la liste et du montant, vérification par le mouvement.
Ces mécanismes doivent être institués et le mouvement doit se donner les moyens de cette vérification. La difficulté de maintenir le rapport de forces dans la durée donne tout son sens à la revendication double de l’ouverture des livres de compte et de création d’une centrale publique d’achat sous contrôle populaire.
Ouverture des livres de comptes !
Centrale publique d’achat !
Dans les semaines suivant février 2009, nos camarades se sont battus pour que le Collectif du 5 février adopte ces deux revendications. Nous n’avons pas été suivi·e·s. On voit aujourd’hui à quel point ces exigences, qui supposent pour s’imposer un certain rapport de forces, répondent à la situation.
On assiste en ce moment à un dialogue de sourds sur les marges bénéficiaires de la grande distribution. Elles sont comme en France, clament les premiers intéressés. Elles sont exorbitantes, réplique-t-on dans le peuple. Publiez les chiffres, ajoutent certains. L’ouverture des livres de compte, vieille revendication du mouvement ouvrier, réglerait le problème dans une certaine mesure ! Cela permettrait aussi au mouvement syndical, d’avoir une base objective pour fixer ses revendications de salaires et de conditions de travail ! Toute lutte qui ne tient pas les deux bouts de la chaîne que sont les prix et les salaires, est insuffisante.
Si les prix sont modérés et que les salaires sont minables, on n’est pas plus avancé que si les salaires sont élevés et les prix exorbitants. Et sous les deux angles, on est confronté à la question du niveau des profits. Ce n’est pas un hasard si Marx a écrit : « Salaires, prix et profits », que l’on devrait se presser de lire ou relire !
La mise en place d’une centrale publique d’achat, avec un monopole sur l’importation, permettrait de résoudre l’un des volets de la question de la cherté de la vie, tout en donnant un moyen d’agir collectivement sur la structure de la consommation, sur l’impact sur la production locale, en plus de permettre un contrôle des marges.
Cette centrale devra être placée sous le contrôle de la population, seule façon de la rendre démocratique. Il serait vain en effet de remplacer l’opacité et les magouilles capitalistes par une autre opacité, bureaucratique et politicienne.
Le transport public, sous contrôle public !
Il y a quelque chose de pathétique dans le bavardage sur le prix du fret, les tarifs de la CMA-CGM, etc.
Bien entendu, faire peser le coût des frais d’approche sur les produits de luxe et pas sur les produits de première nécessité est une question de bon sens, si on veut alléger le fardeau sur les classes défavorisées.
Mais les problèmes reviendront toujours si le transport, par bateau comme par avion, obéit aux règles du marché capitaliste ! On bavarde à droite et à gauche sur la « continuité territoriale », c’est-à-dire sur le financement par l’État d’une partie des coûts.
Il ne vient à l’esprit de ce beau monde que si la sphère publique est appelée à payer, il serait logique que ces moyens de transport soient mis sous le contrôle public pour répondre à des exigences publiques décidées démocratiquement, et non par la « loi du marché » !
L’illusion de la concurrence « libre et non faussée » comme moyen de faire baisser les prix, a largement montré ses limites. La privatisation et la concurrence mènent inévitablement à l’élimination des plus faibles et à des monopoles aux mains des plus gros. Ce cercle vicieux est inhérent au capitalisme. Pour le briser, il faut mettre tout le transport à enjeu public de grande ampleur sous le contrôle public.
Et ce contrôle public doit s’exercer non par quelques bureaucrates bien imbriqués dans l’écosystème capitaliste, mais par la société qui seule doit avoir le pouvoir de négociation avec l’État.