— Par Gaëlle Dupont —
L’un des points les plus attendus de la loi mort-née sur la famille, abandonnée en février par le gouvernement sous la pression de la rue, revient en débat avec l’examen, mardi 6 mai, par la commission des lois de l’Assemblée nationale de la proposition de loi « relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant », censée lui suppléer.
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Il ne s’agit pas cette fois des familles homoparentales, au centre du débat sociétal depuis deux ans, mais d’une réalité beaucoup plus vaste, bien que méconnue et ignorée par le droit : les familles recomposées. Et en particulier de la nouvelle figure familiale du beau-parent, en pleine explosion quantitative, mais clivante, car elle représente pour certains une concurrence par rapport à la filiation biologique.
Longtemps, les familles hors norme ont été méprisées et mises à l’écart. « Après mon divorce et ma remise en couple avec une nouvelle femme, mon père ne m’a plus jamais adressé la parole ! », témoigne Pierre-Marie Dupont, 87 ans, qui a eu au total trois épouses, six enfants, et quatre beaux-enfants issus de sa dernière union.
Il faut dire que son père était né en 1887… A cette époque des remariages avaient lieu, mais ils faisaient suite à des veuvages. Désormais, la recomposition familiale n’est plus exceptionnelle. En 2013, l’Insee a décompté 720 000 familles où les enfants n’étaient pas tous ceux du couple actuel. Un enfant sur dix grandit dans ces conditions. Avec la banalisation des séparations, leur nombre ne fera que croître.
LES LIENS D’AFFECTION SONT SOUVENT LÀ
Comment se vit cette nouvelle réalité familiale pour les beaux-parents… et les enfants ? Les lieux communs sur les beaux-parents font plutôt peur : la marâtre des contes de fées n’est jamais loin. De fait, tout n’est pas toujours rose. « Il faut être dans le don et faire preuve d’une grande tolérance pour accepter quelqu’un qui n’est pas une part de soi », estime Véronique, 53 ans, dont le second mari a élevé le fils. « La première chose à savoir, c’est qu’on est obligés de se respecter, mais pas de s’aimer, théorise Marie-Luce Iovane, la fondatrice du Club des marâtres, l’une des rares associations sur ce créneau. Une relation peut commencer avec difficulté et évoluer au fil du temps. »
Mais les liens d’affection sont souvent là. Nadine Debuchy, 50 ans, parle avec émotion de sa « tribu » : elle et ses deux garçons (en garde principale), ainsi que son compagnon et ses trois filles (en résidence alternée). « Il n’y a pas de différence de traitement entre les enfants, affirme Mme Debuchy. J’aime profondément mes belles-filles. » Les enfants se considèrent comme frères et soeurs.
Ondine Sinsheimer, 20 ans, parle aussi de ses « trois frères et deux soeurs », alors qu’il s’agit de trois demi-frères par son père et deux demi-soeurs par sa mère, qui a eu la garde d’Ondine alors que celle-ci avait quelques mois. « Je n’aime pas ce terme de “demi” car ils n’ont rien d’incomplet pour moi », conteste la jeune femme.
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