— Par Jean-Marie Nol —
Les conséquences économiques et financières pour la France en cas d’escalade du conflit entre l’Iran et Israël, associées à une possible crise énergétique et une reprise de l’inflation, pourraient être significatives et diverses pour la Guadeloupe et la Martinique. Les investisseurs pourraient réagir de manière négative aux incertitudes géopolitiques, ce qui pourrait se traduire par une nouvelle crise énergétique entraînant une augmentation des prix du pétrole et du gaz, ce qui aurait un impact direct sur l’économie française avec des répercussions aux Antilles.Si l’agenda social médiatique est pour l’instant calme en Guadeloupe, le vent pourrait rapidement tourner. Car en coulisse, ce sont nos factures qui flambent. Et nous n’allons pas regarder ailleurs encore très longtemps. La liste des hausses s’allongeront bientôt comme le mercure sous le soleil du carême ces jours ci. En tant que pays importateur net d’énergie, la Guadeloupe serait confrontée à des coûts énergétiques plus élevés, ce qui pourrait peser sur la compétitivité des entreprises et entraîner une hausse des prix à la consommation. Une augmentation des prix de l’énergie pourrait contribuer à une reprise de l’inflation en Guadeloupe et en Martinique. Si les coûts de production augmentent pour les entreprises, celles-ci pourraient être amenées à répercuter ces hausses sur les prix des biens et services, ce qui pourrait alimenter l’inflation. Cela pourrait également mettre sous pression la politique monétaire de la Banque centrale européenne, qui pourrait être amenée à relever encore les taux d’intérêt pour contenir l’inflation.
Une escalade du conflit entre l’Iran et Israël, associée à une crise énergétique et à une reprise de l’inflation, pourrait avoir des répercussions économiques et financières importantes pour la Guadeloupe et la Martinique, nécessitant une gestion prudente des risques par les organismes de crédit et des mesures d’atténuation des dépenses pour protéger toute dérive budgétaire au niveau de la gestion des collectivités locales. Nous sommes bien à l’aube d’une probable flambée des cours du baril de pétrole et du gaz, d’une augmentation significative du fret et d’une reprise de l’inflation.
Le baril de Brent vient de frôler son plus haut niveau annuel, s’approchant dangereusement des 100 dollars. Certes, il s’agit d’une barre psychologique mais elle est importante pour le marché. Cette montée soudaine s’explique principalement par les tensions accrues au Moyen-Orient, notamment à cause des récents affrontements entre l’Iran et Israël. Aujourd’hui, de nouveaux défis émergent, mettant en lumière les tensions entre le Nord et le Sud dit global, ainsi que les conflits régionaux qui continuent de déstabiliser certaines parties du globe comme la guerre Russie/ Ukraine et la guerre Israël/ Palestine Iran. La situation actuelle, marquée par les crises en Ukraine, en Palestine, en Iran et au-delà, soulève des questions cruciales sur l’avenir de la géopolitique mondiale.
Les tensions entre le Nord et le Sud global vont s’intensifier dans les prochaines années jusqu’à peut être provoquer une énorme crise économique et financière qui pourrait dégénèrer en conflit généralisé à l’échelle du globe. En un espace de temps avec des délais très courts, le monde a connu des changements profonds. C’est là une mutation profonde de la société des nations. La pandémie de Covid-19 puis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et ensuite la guerre entre Israël et la Palestine étendue aujourd’hui à l’Iran, ont enterré l’idée un peu naïve d’une économie mondiale relativement homogène régie par une logique essentiellement économique. Nous nous retrouvons désormais dans un espace mondial fragmenté dans lequel les principaux leaders des deux blocs qui se disputent le monde à savoir la Chine et les Etats-Unis se livrent une âpre dispute pour l’hégémonie économique globale. Il en résulte une démondialisation commerciale et productive ainsi que peut être financière dans laquelle la géopolitique prend le pas sur la raison purement économique. C’est dans ce cadre qu’émerge le Sud global à la suite de précédents historiques.
Ainsi depuis la Conférence de Bandung en 1955, les tensions entre le Nord, représenté par les puissances occidentales, et le Sud, composé principalement de pays en développement dit du tiers – monde, ont été une caractéristique majeure de la politique internationale. Ces tensions se manifestent dans divers domaines, notamment économique, politique et culturel.Sur le plan économique, les inégalités croissantes entre le Nord et le Sud alimentent les ressentiments et les frustrations. Les pays du Sud accusent souvent les nations du Nord de maintenir un système économique mondial injuste qui favorise leurs propres intérêts au détriment du développement des pays en développement.
Politiquement, les rivalités entre le Nord et le Sud se traduisent par des désaccords sur des questions telles que les droits de l’homme, la gouvernance mondiale et l’interventionnisme et des ressentiments hérités de la période esclavagiste et coloniale. Face à ces défis complexes, il est crucial pour la Guadeloupe de s’interroger sur les tenants et aboutissants de ce nouvel ordre mondial qui trouve un prolongement dans la région Caraïbes.
Cela nécessite un engagement renouvelé en faveur du dialogue entre les organisations politiques, de la diplomatie et non de l’exaltation comme dans le passé pour défendre le respect du droit international.Dans un monde de plus en plus interconnecté, les problèmes régionaux ont des répercussions mondiales, et dans le passé nous l’avons appris avec la Tri-Continentale, également connue sous le nom de Conférence Tricontinentale, qui était une réunion historique qui s’est tenue en 1966 à La Havane, à Cuba, réunissant des représentants d’organisations politiques et d’associations étudiantes du tiers monde notamment des communistes, des patriotes et l’association des étudiants Guadeloupéens.
Aujourd’hui c’est l’organisation des BRICS qui a pris le relais de la défense des pays émergents. Les BRICS sont un groupe géopolitique regroupant dix pays du « Sud global », notamment des grands émergents (Brésil, Chine, Inde), des puissances régionales (Afrique du Sud, Égypte, Iran, Russie), des pétromonarchies (Arabie saoudite, Émirats arabes unis) ou des pays précaires à forte croissance économique (Éthiopie).Les Brics ont été créés pour trouver des moyens de réformer les institutions financières internationales telles que le FMI et la Banque mondiale, afin de permettre aux économies émergentes de mieux se faire entendre et d’être mieux représentées. C’est en 2001, qu’un économiste de la banque d’investissement Goldman Sachs, Jim O’Neill, a créé l’acronyme « Bric » pour Brésil, Russie, Inde et Chine.
Il s’agit de grands pays à revenu intermédiaire dont l’économie connaissait une croissance rapide à l’époque. Il a prédit qu’ils pourraient devenir les premières économies mondiales d’ici 2050, d’où les tensions géopolitiques entre le Nord et le Sud global devenu un nouveau bloc se dressant contre l’hégémonie des pays occidentaux. En réponse à ces hostilités, les analystes prévoient une situation agitée, soulignant l’importance stratégique du détroit d’Ormuz, par lequel transite une part significative du pétrole mondial.Les actions de l’Iran, incluant la menace de fermeture du détroit d’Ormuz et la saisie de navires, influencent les cours du pétrole. La fermeture de ce passage clé par l’Iran pourrait sévèrement perturber l’approvisionnement mondial en pétrole. De fait, les prix pourraient s’envoler en Guadeloupe. Et pour cause les Antilles se trouvent au cœur des enjeux économiques et géopolitiques liés à cette montée des prix du pétrole et du gaz.Les territoires d’outre-mer, dispersés à travers le monde, sont souvent dépendants des importations énergétiques pour répondre à leurs besoins en électricité, en carburant et en gaz. Cette dépendance accrue aux ressources énergétiques importées les rend particulièrement vulnérables aux fluctuations des prix sur le marché mondial. Pour les territoires de Guadeloupe et Martinique, cette flambée des prix du pétrole et du gaz se traduit par une pression accrue sur leurs budgets énergétiques mais également sur les produits manufacturés.
En effet, une augmentation des coûts de l’énergie se répercute sur les prix des biens et services, ce qui peut entraîner une hausse de l’inflation et une baisse du pouvoir d’achat des citoyens.De plus, les deux îles des Antilles qui dépendent fortement du tourisme peuvent également subir les contrecoups de la hausse des prix du pétrole. Les coûts de transport aérien plus élevés peuvent dissuader les touristes de visiter ces destinations, ce qui pourrait avoir un impact négatif sur l’économie locale et l’emploi dans le secteur du tourisme.Par ailleurs, une perturbation majeure de l’approvisionnement en pétrole pourrait entraîner des pénuries et des hausses de prix encore plus importantes, ce qui aurait des répercussions dévastatrices sur l’économie et la stabilité sociale de nos régions.Face à ces défis économiques et géopolitiques, les élus locaux doivent prendre des mesures pour accélérer la diversification des sources d’énergie et renforcer leur résilience face aux chocs extérieurs. Cela pourrait impliquer des investissements dans les énergies renouvelables, l’amélioration de l’efficacité énergétique et le renforcement des liens régionaux pour garantir un approvisionnement énergétique stable et abordable au Venezuela ou au Guyana. La flambée des cours du pétrole et du gaz et le nouveau rebondissement d’une crise inflationniste attendue représenteraient un défi social majeur pour les Antilles, exacerbant leur vulnérabilité économique et mettant en lumière l’importance d’une stratégie de nouveau modèle économique et social durable et diversifiée pour assurer leur développement économique et leur stabilité sociétale à long terme.
» Pli ou chiwé, pli chyen ka chiwé-w. »
Traduction : Plus tu es nu avec des habits déchirés, plus les chiens te traînent et te déchirent.
Moralité : Un malheur n’arrive jamais seul.