— Communiqué de LDH Guadeloupe & Amnesty International Guadeloupe —
Lors d’un débat organisé au lycée Faustin FLERET de Morne-à-l’Eau, un lycéen de 16 ans, inscrit en 1ère, a prononcé quelques phrases que le professeur, sans lui permettre, semble-t-il, de développer sereinement son analyse, a considérées comme favorables au djihad (selon les témoignages, il aurait, en fait, rappelé que de tels débats n’avaient pas eu lieu lors d’interventions des forces françaises en Afrique causant de nombreuses victimes, et émis un avis nuancé sur le djihad). Suite à la communication qui lui en a été faite, le Parquet de Pointe-à-Pitre a diligenté une enquête : une perquisition à son domicile n’a abouti à la découverte d’aucun élément suspect, l’adolescent a été placé en garde à vue pendant 35 heures puis a été déféré à l’audience du mardi 23 février du Tribunal Correctionnel de Pointe-à-Pitre. Ses avocats ont soulevé une exception d’inconstitutionnalité. L’affaire a été renvoyée. L’opinion publique s’en est émue. Ses camarades du Lycée ont déclenché un mouvement de grève.
La LDH Guadeloupe observe
• qu’en milieu scolaire, des débats de ce type sont organisés sous la responsabilité de l’enseignant ;
• que le lycéen, comme tous ses camarades, a été invité à donner son avis ;
• que la production de cet avis aurait dû normalement donner lieu à une argumentation pédagogique, éducative de l’enseignant et non pas à un signalement auprès de sa hiérarchie administrative puis à une dénonciation à la justice ;
• qu’ainsi, le lycéen a été piégé par ses éducateurs ;
• que l’enseignant et tous ses supérieurs hiérarchiques (Proviseur et Recteur) ont manqué à leur devoir premier d’éducateurs.
La Ligue des Droits de l’Homme Guadeloupe affirme en outre
• que tout lycéen a le droit, lors d’un débat scolaire, d’exprimer librement son avis même s’il n’est pas conforme à celui des Pouvoirs Publics ;
• que des éducateurs ne sauraient d’une part susciter des débats publics parmi des jeunes en apprentissage de connaissances, et d’autre part poursuivre ceux qui osent exprimer leur libre point de vue ;
• que le débat scolaire, moment d’acquisition de connaissance sous le contrôle d’un enseignant, ne doit pas devenir une source de répression.
De façon plus générale, un tel incident, qui s’inscrit dans un processus pervers de délation, démontre une dangereuse dérive sécuritaire.
La LDH Guadeloupe ne peut accepter de tels comportements qui s’en prennent aujourd’hui, en Guadeloupe, à des adolescents et qui risquent de s’étendre à d’autres catégories (ce qui s’est déjà produit en France, notamment à l’encontre de militants écologistes), et les dénonce sans ambiguïté.
Le 25 février 2016
Le présent communiqué est cosigné par Amnesty International en Guadeloupe
Groupe 426 – Guadeloupe