Plus d’une installation photovoltaïque sur trois souffre d’un défaut de conformité avec les normes de sécurité, engendrant un risque d’électrocution ou d’incendie. C’est le message d’alerte que lance le Comité national pour la sécurité des usagers de l’électricité (Consuel). Un organisme, reconnu d’utilité publique et placé sous la tutelle de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC), dépendant du ministère de l’écologie et de l’énergie, qui a pour mission de vérifier la conformité des installations.
Ce comité vient de rendre public le bilan des contrôles qu’il a effectués en 2009. Sur 2 341 installations photovoltaïques passées au crible, 864, soit 37 %, ne satisfont pas aux règlements et normes de sécurité en vigueur. Ce pourcentage marque un léger progrès par rapport à 2008, où 45 % des équipements contrôlés avaient été épinglés. Mais, compte tenu de la forte croissance du parc, le nombre d’installations hors normes est en réalité en hausse. Encore le Consuel n’a-t-il expertisé que 8 % des quelque 30 000 nouveaux systèmes photovoltaïques mis en service en France en 2009.
Dans la très grande majorité des cas, il s’agit d’installations de faible puissance, inférieure à 3 kilowatts. C’est-à-dire de panneaux solaires posés chez des particuliers, sur le toit de leur maison, avec les équipements électriques qui leur sont associés : boîtiers de jonction, onduleur (transformant le courant électrique continu produit par les cellules photovoltaïques en courant alternatif), compteur de production (pour l’électricité générée), compteur de consommation (pour l’électricité du foyer), raccordement au réseau…
Les anomalies constatées sont multiples. Dans 53 % des cas, il s’agit de l’absence d’étiquette avertissant du danger présenté par toute installation électrique. Autres infractions : des prises de terre distinctes non interconnectées (18 %), des câbles ou des connexions inadaptées (18 %), une valeur de la prise de terre incorrecte (10 %), l’absence de parafoudres dans des zones où ils sont obligatoires (7 %), ou encore une section inadéquate du circuit entre l’onduleur et le réseau (6 %).
Selon l’organisme de certification, « parmi les 864 installations non conformes, 72 % présentent un risque d’électrocution et les 28 % restants un risque d’incendie ». Le ministère de l’écologie et de l’énergie considère qu’il s’agit d’un « risque réel » : quelques cas non pas d’électrocution mais d’électrisation ou de début d’incendie ont été signalés, sans victime.
« ABSENCE DE CONTRÔLE »
Ces déficiences mettent en évidence une double lacune, commente Michel Faure, directeur général du Consuel : « L’absence de contrôle obligatoire et le manque de qualification des installateurs. » La réglementation actuelle, qui repose sur un décret de 1972, impose une attestation de conformité, visée par un organisme agréé, pour toute installation électrique neuve dans un logement. Mais cette exigence ne vaut que pour les équipements classiques du consommateur : raccordement au réseau, compteur, circuits électriques intérieurs. Elle ne s’applique pas aux installations de production d’électricité, comme les systèmes photovoltaïques. Lorsqu’il s’agit d’installations de forte puissance, mises en oeuvre par des industriels ou des collectivités, d’autres procédures de contrôle existent. Les capteurs photovoltaïques des particuliers, eux, passent à travers les mailles du filet.
La DGEC, consciente du problème, indique qu’une modification du décret de 1972 est en préparation. Etendant aux systèmes électriques photovoltaïques l’obligation d’attestation de conformité, elle pourrait entrer en vigueur, espère le ministère, « d’ici quelques semaines ». Il n’y manque que la signature du premier ministre, François Fillon.
Cette contrainte devrait favoriser la qualité des installations. Face à l’explosion de la demande, de nombreuses entreprises artisanales (couvreurs, électriciens…) se sont réorientées vers le photovoltaïque, sans toujours avoir la formation et les compétences requises. Le nouveau décret les forcera à acquérir cette qualification, escomptent le ministère et son organisme d’agrément. Celui-ci observe que la proportion d’installations non conformes est très inférieure dans les départements d’outre-mer – Guadeloupe, Martinique et Réunion – qu’en métropole (21 % contre 51 %), car les gestionnaires de réseau s’y montrent plus stricts et que « les attestations de conformité visées par le Consuel sont fournies systématiquement par les installateurs ».
Les risques pour les usagers devraient en être sensiblement réduits. Fin 2009, près de 60 000 demandes de raccordement d’installations photovoltaïques au réseau électrique étaient en attente.
Pierre Le Hir
Un parc multiplié par quatre en un an
Puissance installée. Le parc photovoltaïque a progressé de près de 300 % en 2009, passant de 69 mégawatts (MW) à 269 MW. Littoral méditerranéen, Ouest, Sud-Ouest et Rhône-Alpes-Bourgogne en totalisent 70 %. L’électricité produite représente la consommation annuelle de 125 000 habitants.
Raccordements. Fin 2009, les demandes de raccordement approchaient 3 500 MW (+ 29 % en trois mois). La baisse des tarifs de rachat de l’électricité solaire pourrait freiner cette courbe.
Emplois. Le nombre d’emplois directs de la filière est passé de 4 500 à 8 500 (3 200 dans la fabrication d’équipements et 5 200 pour les études et installations).
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Article paru dans l’édition du 20.03.10 Le Monde