— Par Christian Sainte-Rose-Rosemond —
Je suis Martiniquais et j’ai le privilège d’habiter et de vivre au Vauclin. Je vais à la Pointe Faula quotidiennement. J’observe la catastrophe naturelle sargasse, sur l’environnement, sur la santé, sur l’économie. Fin décembre – début janvier, les nappes, les vagues de sargasses sont de retour pour la énième fois… Depuis 2011. Elles s’amoncellent, s’accumulent au bourg, à Chateau-Paille, à la Pointe Faula, dans les mangroves etc. L’odeur pestilentielle est là, elle se renforce, se répand, elle envahit. A l’inquiétude du début succèdent la colère et le ras-le-bol. Les politiques se remettent en mouvements, le ramassage démarre, une association est à la manoeuvre mais les moyens mis en oeuvre sont dépassés. L’État se manifeste car « il aide » et il faut le faire savoir. La presse est convoquée et sur une vingtaine de mètres de plage parfaitement débarrassée de sargasses, une autorité du Marin s’exhibe et « vend l’État et le ramassage » ! Oui, et 10 m en arrière et sur 300 à 400 m le magma pestilentiel est installé et aucune autorité n’interpelle sur cette mascarade. Le ramassage continue, la puanteur aussi car une grande partie du site n’est pas accessible aux ramasseurs. De partout la colère gronde car la Martinique est une île, un pays avec des pointes, des falaises, des culs-desac, des mangroves et pas seulement des plages. Un éminent globe-trotter de l’écologie, le Ministre de l’environnement en personne est dépêché sur place. L’État du haut de sa superbe s’exprime : « Les sargasses seront ramassées dans les 48 heures ». Vous allez voir ce que vous allez voir… Pa-ro-le… Pawol… qui ne valait pas un clou car en la matière, la parole de l’État ne vaut pas un clou depuis le début de l’échouage des sargasses sur notre littoral.
Dès ce moment, l’État s’est défaussé de sa responsabilité en la matière en prétextant celle des communes dans la zone des 300 m à partir du rivage. Donc « l’État aide ». Mais à partir de 301 m à qui incombe la responsabilité d’éviter un désastre répété en mettant en oeuvre un ramassage en mer ? Clairement et incontestablement à l’État.
Soyons sérieux !
Nos mangroves, sur toute la façade Atlantique et en partie Caraïbe sont en voie de disparition à cause des sargasses. Quelle autorité en Martinique gère ce problème environnemental fondamental (sauf à considérer qu’il n’y a là que peccadille)? Sur ce point j’interpelle les marinpêcheurs et leurs structures de responsabilité… Sauf à penser dans le cas des municipalités comme dans celui des pêcheurs que s’il y a « aide », il ne faut pas cracher dans la soupe en convoquant l’État sur sa responsabilité première pour une solution adéquate. N’y a-t-il pas négligence coupable de l’État ?
Le ramassage dans les 48 heures reste une chimère à la Pointe Faula et ailleurs. L’État, semble-t-il, participait pour 70 % au ramassage ; il se fait bruit que cette « aide » passerait à 30 % et le reste pour les collectivités de Martinique. Toujours à la Pointe Faula, face au Centre Nautique chimère et puanteur continuent avec une accumulation et un enkystement des sargasses sur 10 à 15 m à partir du rivage. Une amélioration est possible avec une « pelle à long bras », engin dont dispose la DEAL. Une demande a été introduite et aurait reçu comme réponse de la sous-préfecture du Marin : « Niet ! » Les stagiaires de l’UCPA ne peuvent plus déjeuner au Centre Nautique ; les marcheurs du matin et du soir cherchent ailleurs ; les acteurs des activités commerciales du coin tremblent. Le site de la Pointe Faula se dégrade côté mer, côté terre.
Le Ti-Sonson que je suis entend parler de barrages, de sargator mais quels résultats ? Les effets s’aggravent… Le cancer envahit. Voilà mon vécu sargasses. Il plaide pour une chaîne de responsabilité : hé, oh, tous les Ti-Sonson, réveillons-nous.