— Par Maurice Laouchez —
Pendant que d’admirables optimistes nous répètent qu’un autre monde est possible, mais sans jamais en définir de crédibles contours, le pessimisme est de rigueur chez la plupart des observateurs et acteurs de notre vie ensemble.
Les risques naturels, les menaces terroristes, le chômage, les drogues, les agressions contre les personnes, les tracasseries administratives, etc. la liste est longue des fléaux auxquels nous devons effectivement faire face. Alors que les autorités monétaires assurent aux banques des volumes d’argent sans précédent dans l’histoire moderne, le surendettement du secteur public conduit la plupart des Collectivités à diminuer leurs dépenses.
Cependant, si chacun y met du sien, et en attendant qu’un jour les difficultés structurelles soient enfin traitées, il est possible de vivre mieux. C’est juste une question de volonté réelle de progrès et de respect mutuel. Deux chantiers essentiels peuvent être ouverts immédiatement, et menés à bien en moins de six mois, avant la prochaine rentrée scolaire. Ils peuvent rendre concrètement meilleur, rapidement, notre monde martiniquais.
Premier chantier : la place du travail dans la vie de ceux qui en ont un
Le fonctionnement actuel de la plupart des pays est directement hérité du XIXe siècle : tout le monde arrive au travail à la même heure, repart à la même heure, et reste pendant toutes ces heures à la disposition des chefs. Résultat : embouteillages, pollution, enfants mal encadrés, locaux surchargés aux heures de travail et vides pendant plus de la moitié du temps, difficulté de gestion des périodes de pointe, etc. Certes, un certain nombre de pays et d’entreprises ont déjà fait le choix de rythmes différenciés, mais leurs pratiques restent mal connues. Il s’agit pour nous, ici et maintenant, avec les représentants des salariés, sur une b ase de concertation et de volontariat, de développer deux pratiques :
– concentrer la semaine de 35 heures de travail sur quatre jours au lieu de cinq
– autoriser le travail à domicile un, deux, trois ou quatre jours par semaine ; c’est une forme de télétravail, tendance en marche dans le monde entier.
Dans tous les cas, le service aux administrés et à la clientèle doit être maintenu. Les amplitudes horaires pourront même être étendues si l’augmentation du chiffre d’affaires permet des recrutements.
Dans la plupart des bure aux, le travail se déroule devant un ordinateur : que celui-ci soit au domicile ou dans un immeuble professionnel, quelle différence ?
Bien sûr, des procédures de confidentialité et d’évaluation doivent être mises en place ; l’efficacité des salariés peut s’en trouver améliorée, et ainsi profiter à tous.
Deuxième chantier : transparence des dépenses publiques
Les électeurs ne paient pas tous d’impôts directs, mais paient tous des impôts indirects et des cotisations sociales. Ils sont tous désireux de savoir comment ces impôts et ces cotisations sont utilisés, avec le sentiment largement partagé que de réelles marges de progrès existent.
Par exemple, un élu partant en mission : il est tout à fait normal que soient connus l’objet de la mission, le coût de la mission et le rapport qu’il produit à la fin de sa mission. Les techniques modernes de communication permettent de porter à la connaissance de tous ceux qui s’y intéressent chaque dépense faite avec nos impôts, notre argent.
Ceux qui s’offusquent d’une telle démarche n’ont pas suffisamment réfléchi au contenu du pacte démocratique : la seule raison d’être des élus est l’optimisation des conditions de vie de ceux qui les élisent. Pas en distribuant les fonds publics individuellement pour assurer les ré-élections, mais en mettant en place les dispositifs collectifs qui améliorent concrètement le quotidien de tous : emplois, sécurité, transports, urbanisme, santé publique, éducation, justice, etc.
La simple obligation de transparence conduirait à une autodiscipline qui éviterait bien des errements auxquels nous sommes confrontés, protégerait les responsables contre d’éventuelles pressions, en même temps qu’elle permettrait de suivre en direct l’avancement des chantiers collectifs sur lesquels la Martinique a pris tant de retard.
Bien entendu, la révision de la place du travail et l’organisation de la transparence n’exonèrent personne des investissements dont la Martinique a besoin, et qui doivent conduire à la création des dizaines de milliers d’emplois.
Mais ces deux innovations majeures ont l’énorme avantage de ne dépendre que de chaque Collectivité, de chaque Service, de chaque Entreprise, de chaque Association. Elles faciliteraient cette décompression que tous les spécialistes proclament urgente dans l’une des régions où le stress f ait le plus de dégâts.
Aucune loi n’est nécessaire, aucun décret n’est à attendre. Il suffit juste d’une réelle Volonté de progrès et de respect mutuel. Il suffit de Vouloir faire un pas supplémentaire sur la v oie de la Martiniqualité.
Maurice Laouchez