Paris – Le collectif d’agents publics Nos services publics a publié lundi une vaste enquête alertant sur la « perte de sens » éprouvée au travail par les fonctionnaires et contractuels.
Sur les 4.555 répondants à un questionnaire administré en ligne, « 80% déclarent être confrontés +régulièrement+ ou +très fréquemment+ à un sentiment d’absurdité dans l’exercice de leur travail« .
« De réorganisations en désorganisations organisées, j’ai été transférée d’office sur un poste où je n’avais aucune connaissance […] Pas d’accompagnement, pas de formation, une hiérarchie +destructrice+: j’ai fini par craquer au bout d’un an », confie Sylvie, adjointe administrative.
Ce ressenti progresse avec l’âge: seuls 23% des moins de 30 ans affirment éprouver « très fréquemment » un sentiment d’absurdité, soit douze points de moins que chez les 50-59 ans (35%).
Il est « lié avant tout à l’incapacité des agents à mener à bien les missions de service public pour lesquelles ils se sont engagés« , explique le collectif.
<Dans le secteur médical, en particulier, la crise sanitaire a agi comme un révélateur de ce désenchantement.
« Je travaille à l’AP-HP depuis 1985. Je n’ai jamais connu un tel nombre de couches décisionnelles: le patient est devenu une donnée abstraite« , regrette Valérie.
En se basant sur les témoignages des répondants, Nos services publics détaille cinq catégories principales de motifs qui engendrent la perte de sens: « Le manque de moyens, un défaut de vision, le sentiment de servir autre chose que l’intérêt général, le poids de la structure et le manque de reconnaissance. »
Le niveau de rémunération, à ce titre, pèse moins que les injonctions contradictoires ou les dysfonctionnements administratifs.
Le collectif a transmis lundi les résultats de l’enquête à la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin. « La priorité numéro 1 de son action est le sens des métiers du service public« , assure le ministère.
Malgré ces difficultés, 52% des personnes interrogées déclarent rester à leur poste pour le service de l’intérêt général, et 50% pour l’intérêt des missions.
Mais 37% des répondants justifient leur maintien dans la fonction par « la difficulté de changer« , en particulier les enseignants, et 35% par « la stabilité de l’emploi« .
Le questionnaire a été administré en ligne du 30 avril au 31 août 2021. Parmi les répondants, ceux de catégorie A (2.805 réponses) sont surreprésentés par rapport à leur poids réel dans les effectifs globaux de la fonction publique.
A l’inverse, les répondants de catégorie B (447) et C (294) sont sous-représentés. Les contractuels représentent 12% de l’échantillon.
Si le ministère garantit que les témoignages collectés seront étudiés en détail, il fait part de ses réserves sur l’interprétation globale des résultats, « la méthodologie choisie n’étant pas celle d’un sondage représentatif« .
« Le nombre de réponses, le nombre de témoignages écrits recueillis et leur niveau de concordance sont néanmoins significatifs d’un sentiment de mal-être partagé chez les agents des services publics dans tous les secteurs, par tous les statuts et par tous les âges« , estime pour sa part le collectif.
Source : AFP / France24