Confinement : les femmes en première ligne
Les femmes sont encore en première ligne … c’est le constat que fait l’Union des Femmes de la Martinique, pendant cette épidémie du Coronavirus, une situation particulièrement difficile. Si toutes et tous sont visé-es par le même virus, la situation met en lumière, s’il en était encore besoin, les différences de genre et de classe dans sa gestion à tous les niveaux. Petit tour d’horizon :
Dans les activités « incontournables », indispensables au fonctionnement de la société, les femmes sont souvent en première ligne
Dans les activités médicales et para-médicales
— Le personnel soignant des établissements de santé et de personnes âgées (majoritairement féminin : médecins, infirmières, aides-soignant·es, ASH, auxiliaires, animateurs·trices …) : dont nous saluons le dévouement et l’esprit de responsabilité, présent-es malgré l’épuisement. Dans les Ehpad, le personnel qui redouble d’efforts pour assurer la survie des personnes âgées et dépendantes, population la plus fragile face au Coronavirus, par les soins et l’animation à intensifier, en raison de l’interdiction des visites, doit conjuguer bienveillance et distanciation sociale.
— Les infirmières à domicile : qui se déplacent sans compter vers leurs patient·es, malgré les risques sanitaires et les dangers d’agressions qui les guettent.
— Les auxiliaires et assistantes de vie à domicile : plus isolées encore, elles assurent la survie des personnes les plus dépendantes. Pour elles le travail continue malgré le manque de gel hydroalcoolique et le peu de masques distribués. Sans compter que pour la plupart, elles-mêmes sont mères d’une famille à protéger du virus.
Les personnels travaillant dans ces secteurs indispensables à la société, qui sont en contact direct avec la population doivent eux aussi pouvoir travailler en sécurité.
Dans les activités et commerces de première nécessité :
— Les caissières de supermarchés : elles manipulent des milliers de produits, côtoient des centaines de client·es souvent inconscient·es ou angoissé-es, doivent rester « professionnelles », malgré la tension et la fatigue.
— Les employées des petites épiceries : elles doivent faire face à des client·es souvent indiscipliné·es, qu’il faut rappeler sans cesse à l’ordre pour les mesures barrières élémentaires. La situation ne les met malheureusement pas à l’abri des remarques sexistes habituelles… (plaisanteries douteuses, propositions répétées, harcèlement.. )
– Plus largement les salarié·es du commerce alimentaire, du nettoyage, les ouvrier·es agricoles. Pour beaucoup, elles sont en situation de précarité : contractuelles, CDD, intérimaires, temps partiels, bas salaires.
Quelle reconnaissance aura-t-on envers elles une fois la crise terminée, alors que l’activité n’a pas baissé ?
A la maison, les femmes aussi en première ligne …
Depuis que le confinement a été décrété le 16 mars dernier, les enfants sont à la maison et les déplacements à l’extérieur sont réduits au strict minimum indispensable.
— Pour les femmes qui vivent seules, il s’agit d’assurer le travail des enfants (oui, on se demande comment font les profs pour les supporter !!!), gérer leur dynamisme, et savoir les occuper … pas facile sans relais ! Assurer en plus le télétravail, pour celles qui sont concernées.
— En couple, si le partage traditionnel des tâches ménagères et familiales n’est pas bouleversé, elles se retrouveront à les assumer, encore davantage, puisque avec tout le monde à la maison, on salit …cuisine …plus !
— Les femmes sont aussi en première ligne de tous les désagréments car trop souvent chargées de famille : faire les courses : on le voit dans les queues interminables des supermarchés, les femmes sont les plus nombreuses à la corvée, mais aussi à gérer les pénuries de gaz, d’eau …
— A elles la charge de se préoccuper des aÎné·es. Comme cela a toujours été, les filles en sont majoritairement chargées ! Quelquefois déjà âgées, elles ont en charge leur mère, un frère ou une sœur handicapé·e …
Plus nombreuses en situation précaire, plus lourdement touchées …
— Gérer les enfants dans un petit appartement, ne se vit pas de la même façon que quand on a un jardin, VOIRE même une possibilité d’y mettre un jacuzzi ou une piscine …
— Faire les courses quand on n’a pas de voiture et qu’il n’y a pas de bus, quand le stop n’est plus de mise, comment faire ? On rencontre sur les routes des femmes avec de lourds cabas marchant à pied, et obligées de faire les courses beaucoup plus souvent, donc avec des risques multipliés
— Avec des prix qui ont augmenté, notamment dans les petites boutiques, manger coûte beaucoup plus cher…
— Les femmes sont les plus nombreuses parmi les personnes âgées seules et à revenus faibles.
— Même si certaines familles sont déjà connues des services sociaux, la situation accroit la précarité.
Crise sanitaire et violences conjugales, violences intra-familiales
Le confinement est un terreau propice pour les violences conjugales, qui touchent on le sait très majoritairement les femmes, et pour les violences familiales envers les enfants.
Promiscuité surtout quand on vit dans de petits espaces, stress, difficulté à se signaler, face à face agresseur-victime exacerbé, doutes sur la capacité des forces de l’ordre à intervenir rapidement, doutes sur le fait de pouvoir partir (ce qui est en contradiction avec l’obligation de rester chez soi), font planer l’inquiétude sur les victimes de violences.
Rédigé par : Melody Thomas, le 10 avril 2020
Publié dans : Actualites, Martinique