— Par Sarha Fauré —
Un héros de la kora : l’héritage de Toumani Diabaté
Toumani Diabaté, un musicien malien d’exception, a quitté ce monde le vendredi 19 juillet à l’âge de 58 ans, suite à une courte maladie. Sa disparition, annoncée par son fils Sidiki Diabaté sur les réseaux sociaux, a suscité une vague d’émotions et d’hommages dans le monde de la musique africaine et au-delà. Virtuose de la kora, harpe-luth à 21 cordes, Toumani Diabaté était bien plus qu’un musicien : il était un pont entre traditions ancestrales et modernité, un ambassadeur culturel et un maître incontesté de son art.
Un héritage griotique
Né le 10 août 1965 à Bamako, Toumani Diabaté appartenait à une illustre famille de griots, les gardiens de la tradition et de l’histoire orale en Afrique de l’Ouest. Sa mère, Nama Koïta, était chanteuse, tandis que son père, Sidiki Diabaté, fut couronné roi de la kora lors du Festac77 à Lagos. Dès l’âge de cinq ans, Toumani commence à apprendre la kora sous la direction bienveillante de son père et de son grand-père, marquant ainsi le début d’une carrière musicale prodigieuse.
Le virtuose innovateur
Bien qu’enraciné dans la tradition, Toumani Diabaté ne s’est jamais laissé enfermer dans les limites du passé. Il a exploré de nouveaux horizons, collaborant avec des musiciens de divers genres et cultures. Avec Ali Farka Touré, il a enregistré les albums « In the Heart of the Moon » et « Ali and Toumani », tous deux récompensés par des Grammy Awards. Sa capacité à fusionner la kora avec d’autres styles musicaux lui a valu une reconnaissance mondiale, travaillant avec des artistes tels que le bluesman Taj Mahal, la chanteuse de jazz Dee Dee Bridgewater, et même la chanteuse islandaise Björk.
Un rayonnement international
Toumani Diabaté a porté la voix du Mali et de la kora aux quatre coins du monde. Son talent et son ouverture d’esprit ont fait de lui un artiste recherché pour des collaborations transculturelles. En 1987, sa rencontre avec le groupe de flamenco Ketama à Londres a donné naissance à deux albums marquants, « Songhai » et « Songhai 2 ». Ces œuvres restent des références en matière de fusion musicale.
Des hommages émus
À l’annonce de son décès, les hommages ont afflué. La diva malienne Oumou Sangaré a salué « un pont entre nos traditions ancestrales et la modernité », tandis que le chanteur sénégalais Youssou N’Dour a qualifié Diabaté de « virtuose de la kora, un arrangeur musical hors pair ». Salif Keita a parlé de la perte d’un « trésor national », soulignant l’impact profond de Diabaté sur la musique malienne et mondiale.
L’inspiration continue
Toumani Diabaté laisse derrière lui un héritage inestimable. Son dernier album, « Toumani, Family & Friends », sorti en 2022, illustre bien sa vision artistique, réunissant des musiciens d’Afrique de l’Ouest comme Fatoumata Diawara et Tiken Jah Fakoly. Son fils, Sidiki Diabaté, continue de porter le flambeau, perpétuant la tradition des griots tout en explorant de nouvelles avenues musicales.
Ouvrir à tous les brassages
La disparition de Toumani Diabaté marque la fin d’une époque, mais son influence perdure à travers ses enregistrements et les nombreuses vies qu’il a touchées par sa musique. Il restera dans les mémoires comme un virtuose de la kora, un innovateur audacieux et un ambassadeur culturel exceptionnel. Son credo, « ouvrir à tous les brassages » tout en restant fidèle à ses racines, continuera d’inspirer les générations futures.