Tortues marines, de la tradition à la protection …
Il n’est pas si loin le temps où le ragoût et les steacks de tortues vertes, karets ou caouannes figuraient au menu des restaurants de l’île et au sommaire de bon nombre de livres de recettes de cuisine antillaise. Pas si loin, car l’arrêté ministériel de protection des tortues marines ne date que de 2005. Il prévoit la protection de toutes les espèces de tortue, de leurs oeufs et de leur habitat, les contrevenants étant passibles de peine de prison, de saisie du matériel de pêche et d’amende pouvant atteindre 22 500 € ! Devant ce risque et le net
appauvrissement de la ressource, les pêcheurs professionnels dont elles faisaient les choux gras ont dû arrêter les prélèvements même si beaucoup de spécimens se noient encore accidentellement dans leurs filets, car il n’y a plus de pause de filets à tortue. Les ramasseurs d’oeufs ont dû aussi arrêter leur activité florissante. En effet, les oeufs réputés pour leurs vertus aphrodisiaques et vitaminiques se vendaient à prix d’or! Quelques braconnages persistent toutefois avec la force du souvenir de la tradition caribéenne dont les peuples ont toujours consommé la tortue comme un aliment de force et de santé !
LES TORTUES MARINES EN MARTINIQUE
La Martinique est réputée pour ses eaux claires et chaudes bordées de belles plages de sable fin, décor idyllique qui participe à la fameuse vie douce sous le soleil des tropiques, rythmée par le souffle léger des alizés.
N’oublions pas cependant que ces lieux paradisiaques sont également des sites naturels à part entière, indispensables au maintien de nombreuses espèces animales et végétales, dont les tortues marines. En effet, la plupart des plages de Martinique sont des sites de ponte pour ces animaux qui parcourent des milliers de kilomètres pour se reproduire ici, tandis que les eaux côtières abritent leur site d’alimentation.
La prochaine saison de ponte s’annonce bientôt avec les premières tortues qui devraient arriver en février ! Alors soyons attentifs : ne dégradons pas leurs habitats en faisant des feux au sol ou en laissant nos déchets et observons-les discrètement à distance (au moins 10 mètres) sans lumière. De la même façon, lorsque nous avons la chance de les observer sous l’eau, pendant qu’elles sont en train de se nourrir ou de se reposer, veillons à ne pas les déranger, arrêtons de les harceler pour les voir de toujours plus près !
Véritables traits d’union entre les territoires de la Caraïbe… et bien plus encore !
Les tortues marines ne connaissent pas les frontières. Une fois adultes, elles partagent leur temps entre deux sites vitaux principaux : leur site d’alimentation et leur site de reproduction. Ces sites peuvent être distants de plusieurs centaines de kilomètres, voire de plusieurs milliers ! Elles vont aller de l’un à l’autre tous les 2 ou 3 ans en moyenne.
Les études récentes menées par le CNRS en collaboration avec l’ONCFS et le réseau Tortues Marines Martinique ont montré que les tortues vertes qui grandissent sur les herbiers en Martinique s’éparpillent dans tout l’océan une fois l’âge venu de leur première r e p ro d u c t i o n : côtes brésiliennes, Floride mais également côtes africaines ! Les tortues
imbriquées ont, quant à elles, révélé des trajets de migration après leur ponte en Martinique les menant près des côtes du Nicaragua ou dans les îles des Grenadines.
Ces études innovantes vont se poursuivre afin d’obtenir des éléments permettant à la fois d’avoir une vision globale de leur aire de répartition et donc de renforcer les collaborations internationales, mais également d’établir une gestion concertée avec les acteurs locaux. En effet, malgré les signes encourageants de regain des tortues vertes ou imbriquées dans les eaux depuis leur protection intégrale datant de 1993 en Martinique, ces espèces sont toujours menacées d’extinction aujourd’hui et il est donc nécessaire d’agir ensemble pour des actions de conservation à long terme.
Pour plus d’informations :
• www.tortuesmarinesmartinique.org,
• Page Facebook Réseau Tortues Marines Martinique,
• ou encore le film « A la rencontre des tortues marines de Martinique » produit par l’association Reflet d’Culture (renseignements au 06 96 234 235).
Bien plus d’informations dans le Griot des Mangliers N° 3 de janvier 2016 à Télécharger ici