— Par Dominique Daeschler —
Prendre le petit escalier en colimaçon et s’arrêter au premier : à droite, à gauche ça bourdonne autour des téléphones, des ordinateurs, des imprimantes. On charge les photos ,consulte la presse, revoit un texte, prend des rendez vous ,s’occupe d l’intendance au sens premier ( les buffets du Toma font appel à tous les talents culinaires de la maison) et si l’on s’écroule dans le divan du petit salon ( esprit « puces » garanti) c’est encore pour prendre le temps d’expliquer, de résoudre, de rencontrer…C’est le domaine de Marie Pierre Bousquet codirectrice qui officie dans un petit bureau surchargé de paperasse rebelle en compagnie de Séverine l’administratrice : les murs cependant attestent avec consignes et planning d’une vraie conscience organisationnelle !
DD Vous avez un parcours de manager plongé jusqu’au cou dans l’économie libérale et hop, d’un coup le théâtre, c’est un changement radical …
MPB Oui, Sup de Co, IBM, ITACHI, la Banque, une société de super calculateurs, les marchés boursiers c’est un autre monde. Il y a eu toute une conjoncture d’évènements (époque du fameux serpent budgétaire européen) qui ont fait que les risques du change devenaient trop élevés. La question d’une évolution professionnelle se posait. C’est à ce moment que j’ai rencontré Greg (Germain) qui avait li aussi envie d’aller plus loin que son métier d’acteur.
DD comment naît le projet du Toma ?
MPB un premier spectacle à Avignon et une rencontre décisive avec marie José Roigt maire qui se dit prête à nous confier un lieu la Chapelle du Verbe Incarné. 1998 c’est le 150 anniversaire de l’abolition de l’esclavage. Banco. Greg mont L’Esclave et le Molosse.
DD C’est parti pour un lieu consacré à l’Outremer. Comment vous vous répartissez le travail avec Greg Germain ?
MPB Greg fait le travail politique et conçoit la programmation, je prends en charge l’organisation et la production.
DD Et 2003 ? Le In est annulé. Il me semble que vous avez rué dans les brancards…
MPB Le Toma souhaitait maintenir la programmation. Avec Nathalie Laulé, nous avons fait un sondage auprès des compagnies et des lieux : la plupart souhaitait jouer. Je suis allée le dire à la conférence de presse d’Avignon public off (association qui gérait le off) qui était pour l’annulation. De fait la majorité des lieux ont assuré leur programmation. Commence un long feuilleton, naissent deux nouvelles associations Alfa et Avignon festival et compagnies qui se consacrent au Off. Tir au but. Avignon festival et compagnies prend la responsabilité du off, André Benedetto devient président. A sa mort(2009) Greg assure l’intérim puis prend la présidence jusqu’en 2015.
DD Et le développement de l’audiovisuel
MPB Greg avait créé Cinédom plus pour permettre d’intégrer les Dom dans les interventions majeures du CNC. Il y a, dès le départ, un intérêt majeur pour l’audiovisuel.
DD C’est de là que part l’envie des captations ?
MPB Oui. On commence en 2005. On travaille aujourd’hui aussi le documentaire et on lorgne du côté de la fiction. C’est la société Axe Sud qui s’occupe de la production audiovisuelle et l’association du verbe Incarné du théâtre.
DD Pour quelles chaînes et médias ?
MPB RFO, France O, Arte, France 2…
DD ça fait quoi d’avoir 20 ans ?
MPB Du bien. On est dans une phase très dynamique. Nous nous réjouissons, Greg et moi, de l’arrivée de Mayotte, du ressenti positif des compagnies et du public (beaucoup de spectacles très pleins) qui vient pour l’Outremer. Le sentiment de se remettre dans un axe, d’avoir un œil neuf est porteur.
DD Et elle file vers le rendez vous qui patiente, sourire aux lèvres et œil noisette un rien inquisiteur.