F-d-F : au 14°N 61°W, à 20h le 27-01-2015
Synopsis
L’action se déroule dans un pays imaginaire, l’Eldorado, qui offre, cependant, des similitudes avec le Brésil des années 1960. Au plus fort d’une époque en crise, le poète Paulo Martins est écartelé entre ses aspirations politiques et sa passion artistique. À l’agonie, il évoque, à présent, son parcours. Il a servi deux leaders politiques. L’un, Dom Porfirio Diaz, l’a protégé, utilisant son talent littéraire à des fins de pouvoir. Pourtant, Paulo Martins le trahit pour rejoindre ses adversaires politiques groupés autour de Don Felipe Vieira, dirigeant populiste et démagogique. Après son élection comme gouverneur, Vieira, confronté à l’inconsistance des promesses faites aux paysans pauvres, finit par utiliser Paulo Martins à des fins policières. Désabusé, le poète se replie sur lui-même et sur ses premières amours avec une fiancée bourgeoise présentée, autrefois, par Dom Porfirio Diaz, commettant une infidélité à l’égard de Sara, militante de l’autre camp… Mais, Sara et ses camarades l’enjoignent et le convainquent de les rallier à nouveau. Il trahit une seconde fois Diaz et de façon plus grave. Ce dernier réussit, cependant, à être couronné. Quant à Paulo Martins, « sa quête conjointe de la « justice et de la beauté » le vouera donc à un destin de déchirure, de trahisons successives de lui-même et de ses amis (et de ses amantes), et finalement à ne pouvoir dépasser l’horreur et le dégoût que dans la mort et le sacrifice. »
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Considéré le film plus important et polémique de Glauber Rocha et réalisé sous le nez de la dictature militaire brésilienne, le film confirme l’acuité politique et sociale du cinéaste à propos de l’impasse persistante du Brésil et de l’Amérique Latine. Totalement révolutionnaire pour l’époque et par son fort contenu social, le film réaffirme toute la génialité de Rocha et représente son manifeste poétique et politique. La restauration en haute définition de ce classique du cinéma latino- américain est le résultat d’un travail minutieux (il s’agit du premier long métrage restauré entièrement par procédé numérique en Amérique latine) qui permet de revoir le film avec une qualité identique à celle de la première copie, quatre décennies après sa sortie en salle.
Glauber Rocha fut l’enfant terrible du cinéma brésilien, le mythe le plus respecté du Cinema Novo et son porte-parole infatigable. C’est la parabole qui caractérise l’aspect expérimental, délirant et moderne de son oeuvre, parabole par laquelle il essaya de résoudre ses problèmes idéologiques et ses équivoques. Il créa pour cela son cinéma d’auteur et inventa son propre langage, reconnaissant Eisenstein, Buñuel, Visconti et Welles comme ses maîtres. Toujours incompris et marginal dans son pays, Rocha ne connut jamais de succès commercial et fut même rejeté par certains critiques et intellectuels.