Je ne sais plus parler
Je ne sais plus parler mesdames
Mesdemoiselles et messieurs
Parce que ma tête pense et croit nécessaire
D’ordonner à ma main
De foutre à mes doigts une expansion de doigts
Qui s’arroge le droit de foutre à ma bouche
Une expansion de gueule
Qui elle se prend pour je ne sais quelle
Cheminée
Persuadée qu’elle pourra réchauffer
A la fois de l’hiver-du-gwo-pwèl-
De-la-solitude-et-de-la-mélancolie
Ainsi comprenez bien mesdames
Mesdemoiselles et messieurs
Je ne sais plus parler…
Je ne sais plus parler…
Parce que mes mots me font signe
Qu’ils se sont brûlés les lèvres
A force de flirter avec NICO…
Non pas Nicolas…
Bon vous comprenez…
Et je vous fais confiance…
Donc je me coltine
A persuader mes narines
De ne pas porter foi
Aux paroles de mes mots qui pensent que
L’expansion de mes lèvres
Finira par avoir raison de moi
Ne pouvant plus parler
Je me suis donc mis à écrire…
Aussi j’ai vu mon médecin
Lui il a l’art d’aborder les questions délicates
En ligne de touche
Il sait ce que sait lui prendre la tangente
Alors il m’a dit…
Savez-vous monsieur
Que vous devez vous dispenser de l’autre stylo
Dont vous vous servez
Que voulait-il dire par là
Etait-ce ça…
La scène se passe dans mon bureau mesdames
Mesdemoiselles et messieurs
Ça fait des années que ça dure…
Ma page blanche bien à plat sur le bureau
Je suis fan moi
De la page blanche
Ça fait des années que ça dure…
A ma droite mon stylo qui bave
Et mon stylo qui fume
Je ramène mon stylo qui bave à ma feuille
Ça fait des lettres qui se tiennent bien la main
Et des mots libres déséquilibrés mais libres tout à fait libres
Et dans l’ensemble ils semblent bien s’accorder
Ça fait des années que ça dure…
Je dépose momentanément mon stylo qui bave
Et je prends mon stylo qui fume
Je ramène mon stylo qui fume à ma gueule de bois
Ça me fait donc une expansion de gueule en paille
Avec des volutes de fumées en pagaille qui me caressent le visage
Ça fait longtemps que ça dure…
J’abandonne mon stylo qui fume un moment
En équilibre sur le bout de mes lèvres de saison sèche
Et je reprends mon stylo qui bave
Et je m’obstine à accorder mes mots désaxés… saccadés…
Saccadés brusquement par des toussotements
Ça fait longtemps que ça dure…
Alors docteur
Pourquoi laisser tomber l’autre stylo
Monsieur
Je crains que vos jours soient désormais mal agencés
Car vous vous êtes fait
Une grosse tache d’encre…
Aux poumons….
Jean durosier desrivières, « Tache d’encre aux poumons »,
Pour La Ligue Contre le Cancer, Comité de Martinique