« Surnaturels » de Pierre Roy-Camille à la Fondation Clément

Du 16 mai au 22 juin 2014 Ouvert tous les jours de 9h à 18h.

—Présentation d’Anne-Claire Plantey —

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( Extraits du catalogue)

Né en 1979, Pierre Roy-Camille, vit et travaille à Paris. Son travail conjugue le dessin, l’utilisation des outils numériques et la réalisation de créations in situ par le biais de peintures murales ou d’affiches ; il se définit volontiers comme un producteur d’images. Marqué du sceau du métissage et d’une enfance passée entre la Martinique paternelle et la métropole maternelle, une partie de lui demeure manquante, comme éternellement séparée. Cela donne lieu à une construction identitaire riche et complexe, un imaginaire imprégné d’une nature puissante et luxuriante dont frémit subtilement toute son œuvre. être d’ascendance antillaise lorsque l’on possède la blondeur de ses cheveux, le turquoise de son regard pose dès le départ la question de l’origine, de même que l’usage de faux-semblants, thèmes récurrents que l’on retrouve au cœur de ses préoccupations plastiques.
Sollicité dans des lieux publics ou en pleine rue, l’artiste conçoit l’exercice comme un nouvel espace de liberté conquis sur l’atelier ou le lieu d’exposition. Débordant du cadre avec jubilation, le dessin s’autonomise, se développe, s’accroit, se fond dans l’environnement architecturé auquel l’image se trouve soudainement appartenir… On peut ressentir la dimension politique de sa démarche à travers cette volonté de développer des collaborations sur ces projets qui s’apparentent à la camaraderie ou au compagnonnage. Il tisse de nouveaux types de rapports, d’échanges que l’on retrouve dans la vie de quartier, offrant une vision inattendue à ses habitants, un enchantement du réel.
Ainsi, au croisement de la rue Sainte Marthe et de la rue Sambre et Meuse, dans le 10ème arrondissement de Paris, une étonnante aventure murale a ponctué les saisons des riverains pendant presqu’un an. Une œuvre en recouvrant une autre, d’un nuage à l’éclosion d’un arbre noueux et délicat, un univers à part a émergé comme par miracle d’un angle de mur bétonné. Se prêtant volontiers à l’exercice de l’apparition temporaire, il s’est vu confié par le Centre Culturel Saint-Exupéry la création de son 12ème Bar Éphémère. Sa flore graphique a pris entièrement possession du lieu, étendant ses ramifications dans un processus immersif, recouvrant du sol au plafond l’ensemble du mobilier de papier imprimé, telle l’expansion d’une végétation prolifique et vorace.
Cette exposition à la Fondation Clément présente une dizaine d’œuvres de grand format sur papier photo qui se succèdent avec régularité. Cela pourrait d’abord faire penser au travail d’un affichiste ou d’un imprimeur. La présence d’une grande peinture murale mélange d’avantage les cartes de cet illusionniste, il s’agit bien de trucages, de tours. Le fait que ces paysages soient présentés au format portrait achève de nous convaincre que nous sommes sur un jeu de piste et qu’aucune réponse définitive ne sera donnée ici. Ce goût pour le simulacre rappelle la facétie des toiles d’Ed Ruscha. De mélanges techniques et glissements sémantiques, la véracité de ces dessins peints semble jouer à cache-cache derrière chaque taillis.
Dessinée avec rigueur au feutre, à l’huile et à l’encre, une accumulation de lignes et de points nous délivre un ensemble végétal et minéral fragmenté. Certains éléments sont dupliqués numériquement, imprimés, scannés puis peints avec une régularité automatique. D’un mélange de signes abstraits on parvient au formel, où affleure parfois l’accident et qui renoue avec le faillible; de petites marques de corrosion viennent ponctuer la brillance parfaite du papier photo et les coulures se mêlent au relief accidenté. L’image arrive chargée d’une sorte de vécu, comme une patine. On retrouve dans l’usage du motif jusqu’à saturation, une admiration pour les peintures de Christopher Wool. Volontairement indéfinissable, évoquant la gravure romantique du dix neuvième siècle, l’estampe japonaise comme la photographie et le systématisme d’une impression, Pierre Roy-Camille se réapproprie ces codes et offre une œuvre empreinte de poésie, sous tendue par une idée de péril. La menace possible de submersion pointe sous le rideau moiré de ses vagues.
Les roches s’assombrissent, oscillent entre le sublime d’un désert, porteur d’infini et le tranchant impitoyable des angles si l’on y chute.
La présence familière d’une forêt, au premier abord féérique, renferme de façon ambivalente une part de ténèbres.
Les œuvres les plus récentes incorporent l’utilisation de la couleur, tout en conservant l’esprit sombre de départ, apparaissant dans un lavis où chatoient des nuances moirées.
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