Dans un ouvrage qui vient de paraître, Vincent Goulet, sociologue spécialiste des médias et des pratiques culturelles, ancien maître de conférences à l’université de Lorraine, annonce la couleur avec un titre quelque peu provocateur, « Médias : le peuple n’est pas condamné à TF1 ». Entretien.
Partant du constat, « regrettable paradoxe », que « les classes populaires semblent se désintéresser de l’information politique, ne fréquentent guère les “médias de gauche” et préfèrent les médias commerciaux », vecteurs d’une idéologie libérale ou conservatrice, Vincent Goulet propose une réflexion vigoureuse et engagée, nourrie par l’histoire et la sociologie du journalisme, sur le rôle de la presse dans la relance de la critique sociale dans une visée émancipatrice.
HD. « Le peuple n’est pas condamné à TF1 », annoncez-vous dans le titre de votre dernier ouvrage. En quoi serait-il voué aux médias dominants ?
VINCENT GOULET. On constate que les médias les plus fréquentés par les classes populaires ne sont pas les plus progressistes. Les médias progressistes, émancipateurs, de gauche pour le dire brièvement, ne prennent pas véritablement en compte certains usages sociaux des médias d’information par les milieux populaires : se situer dans la hiérarchie sociale, faire des pieds de nez à l’autorité, se réassurer sur les risques de l’existence – ce à quoi servent les faits divers – ou encore transmettre non seulement des visions du monde, mais un style de rapport au monde.