— Par Michèle Bigot —
D’Arthur Rimbaud
Festival d’Avignon off 2018
Théâtre des Halles
N’en doutons pas : seul Jean-Quentin Châtelain était à même de relever le défi : porter sur scène ce texte prodigieux, qui défie les lois du temps : Une saison en enfer. Entreprise aussi intrépide que périlleuse. Comment faire passer le spectateur anonyme de la vie ordinaire au sublime et au monstrueux, sans autre forme de transition ? On arrive dans la salle obscure et envahie de fumée : la respiration peine, le regard se fait errant. Nous voilà au bord de la géhenne. La cérémonie peut commencer. Sur le plateau, un espace chtonien, une sorte d’anneau magique et menaçant, dessiné par une levée de terre. En son centre, une surface noire : l’avant dernier cercle de l’enfer, l’entrée de l’empire des morts. C’est là que se produit l’acteur. Quand arrive la lumière, il est déjà placé au centre, pieds nus, fiché au sol à une place d’où il ne bougera pas. Corps immobile mais mouvant au gré de la musique du texte, ondulant sous l’orage des mots, terrassé par la force noire de l’expression, il est à la torture, il jouit.