— Par Dominique Daeschler —
En hommage à Callas, dans l’espace sacré du cloître des Célestins où les platanes font voûte, Raimund Hoghe prend tous les risques, confrontant son corps menu à l’inamovible des pierres et à la vibrante démesure de la cantatrice. Avec humilité et une extrême concentration, il trace ses chemins, construit son labyrinthe, évoque l’errance et la solitude. Apportant une signification symbolique à tous ces petits tas de vêtements repères et tombes à secrets, il s’arrête, prend le public en pleine face avant d’oser « une fente » de profil. Que reste t ‘il du mouvement dans des postures figées ? Que dit un geste non terminé, arrêté dans son envol ? Les éléments du corps (tête, bras, épaules, jambes), à l’affût du chant, semblent se déplacer en autonomie formant un cosmos qui a ses propres règles. Dans l’épuration, la radicalité de la lenteur voire de l’immobilisme, la communion entre voix et mouvement se fait presque oppressante, rappelant une Callas morte dans l’oubli. De l’icône de la cantatrice, de « l’image » du danseur, il ne reste rien : le travail se fait dans les failles, pour dire que l’Art se construit avec des fragilités, des souffles et des formes éphémères.