—Par Rémy HERRERA, chercheur au CNRS, Centre d’économie de l’université de La Sorbonne-Paris-I.—
Depuis plus de trente ans, un courant de pensée domine en économie : c’est l’idéologie scientifique « néoclassique », qui croit à un « équilibre général des marchés » et entretient des liaisons très étroites avec le néolibéralisme. Pourtant, le fait est – incroyable, mais vrai ! – qu’il n’existe pas, à l’intérieur du courant dominant, de théorie de la crise. En clair, l’idéologie du capitalisme non seulement ne prend pas la crise pour objet d’étude, mais encore n’est pas en mesure d’expliquer la crise du capitalisme réellement existant. Les rares économistes orthodoxes qui s’y intéressent l’analysent d’ailleurs à partir de facteurs toujours extérieurs aux marchés, venant perturber les mécanismes de correction automatique par les prix : syndicats « archaïques », interventions de l’État, « bugs » informatiques, fraudes de traders isolés… Mais pour eux, la concentration de la propriété privée et la logique de maximisation du profit individuel ne sont pas des problèmes.