— Par Roland Sabra —
C’est une histoire d’homme, une histoire de haine et d’amitié, une histoire de rivalité et de complicité, une histoire de mots et de gestes, une histoire d’illusions perdues et de vieillesse, une histoire qui pose l’éternel problème de comment se débarrasser de l’autre avec lequel on a tant partagé? Comment faire la peau à celui qui nous a fait rire que l’on a admiré et qui soudain apparaît comme un obstacle sur le chemin finissant? Les clowns font rire parce qu’ils grossissent nos maladresses, nos travers. Ils sont donc trois, trois clowns en fin de course qui se retrouvent par hasard, dans la salle d’attente d’un music-hall avec l’hypothétique espoir de décrocher un dernier contrat, un ultime « cacheton ». Ils ont formé un trio dans des temps anciens, très anciens, avant de suivre des routes différentes mais toujours chaotiques nourris de précarité et de lendemains incertains. Il y a si longtemps qu’ils ont joué que les costumes qu’ils portent quand ils ne sont pas élimés semblent sortis du magasin de location.
Trois pour une seule place et vite tombent les masques, la haine du semblable, la haine du petit autre qui, parce que trop ressemblant menace l’identité vacillante, alors vient le temps du désir de meurtre du trop proche.