Une âme d’ânée…
Je suis une tête de mule,
résistant qui fait des émules
mais le grand nombre des années
pèse sur moi comme une ânée !
Si l’âne, ce pauvre animal,
non content d’être un exploité,
est injustement méprisé
alors qu’il ne fait aucun mal,
chargé de tous maux de la terre
et voué comme une âme damnée
depuis sa naissance à l’enfer,
on n’a jamais pu lui ôter
sa faculté à résister…
Aussi, n’ayant jamais cessé
de considérer comme un frère
cet autre damné de la terre,
je persiste à me rebeller
et à ne point me laisser faire
par les champions de l’oppression,
de la carotte et du bâton !
À la mémoire de Cadichon*
j’ai voulu écrire ces vers
pour qu’on cesse d’être sévère
avec cet âne doux et bon…
* l’âne intelligent, héros des “Mémoires d’un âne” de la comtesse de Ségur.