— Par Dominique Daeschler —
A travers deux livres « un Afghan à Paris » et « Chant de la mélancolie », Mahmud Nasimi évoque le long périple qu’il a accompli avant d’arriver à Paris : Iran, Turquie, Grèce, Serbie, Hongrie, Autriche, Allemagne, Belgique. Parti précipitamment de Kaboul en 2013 car menacé, il prend la route de l’exil et y connaît ces douleurs multiples qui blessent jusqu’à l’intime : peur, soif, faim, duplicité des passeurs, vols et trahisons, prison et chantages…
De son pays, plongé depuis si longtemps dans la guerre il dit « le nombre de bombes qui ont explosé dans mon pays l’emporte sur celui des étoiles du ciel ou des grains de sable du désert ». Le ton est donné, sans le savoir encore, Mahmud Nasimi entre en poésie et fait bagage d’images, de métaphores liées aux nuances précieuses du dari . Du cheminement chaotique à travers l’Europe, il donne des instants de vie sans s’appesantir sur l’horreur même quand il croise la mort. Il sait attraper à la volée un souvenir qui aide à vivre (la magnifique grand-mère, les baisers de la mère, la bien-aimée, le copain voleur de biscuits, l’oncle intransigeant, les tantes insouciantes, la grande cour inondée de soleil) et se taire par pudeur et dignité.