Un film immense aux limites de l'insoutenable.
— Par Roland Sabra —
Immobile… L’immobilité, ça dérange le siècle.
C’est un peu le sourire de la vitesse, et ça sourit pas lerche, la vitesse, en ces temps.
Léo Ferré « Il n’y a plus rien »
Il est des films comme des rencontres improbables. Ce soir là, dans la salle n°3 de Madiana, il y avait, au début de la séance, une douzaine de personnes tout au plus. A la fin de la projection les effectifs avaient fondu de moitié. Et pourtant !
Rares sont les moments de cinéma d’une telle intensité. Un long film, sans dialogue, avec une succession de plans fixes, avec pour seuls mouvements les battements de cils d’un homme perdu sous la pluie, le tremblement d’un panneau publicitaire tenu à bout de bras dans la violence du vent, un geste de la main, maintes fois répétées pour remettre en place une chevelure, la contemplation fascinée d’un paysage de ruines illuminées par un soleil nocturne…
Et le spectateur figé dans l’éternité de l’instant, à son cœur défendant, voit convoquer ses monologues intérieurs, ses pensées intimes, ses combats sans cesse oubliés et sans cesse devant lui.