— Par Roland Sabra —
«Mieux vaut être debout, tenu par son mensonge, qu’allongé, écrasé par la vérité des autres. Je ne vole pas, je me rembourse. Je ne cambriole pas, je récupère. Je ne trafique pas, je commerce. Je ne me prostitue pas, je m’invite. Je ne mens pas. Je suis déjà ce que je serai. Je suis juste en avance sur la vérité : la mienne !» Comme une claque dans la gueule Badia ( Soufia Issami) balance au spectateur dés les premières images le demi décalogue qui lui sert de viatique dans la Tanger livrée tripes à l’air à la mondialisation. On y décortique des milliers de tonnes de crevettes péchées dans la mer du Nord, conditionnées dans d’autres pays et distribuées dans le monde entier. Tanger filmée comme jamais un touriste ne la verra. Tanger, ville passion de la réalisatrice Leila Kilani. Tanger qui par le caprice du monarque bascule en dix ans de l’immobilisme figé d’une ville frontière à l’étourdissement affolé d’une ville passoire. Tanger ville coupée d’elle-même par des barbelés pour protéger la Zone Franche, empire du libéralisme absolu.