— Par Benoît Hopquin —
Cette scène est devenue le symbole du drame. Sous les décombres, Eric Mohamed s’accroche désespérément à la
main de son sauveur, Yves Verdier, un autre para français. Les deux hommes ne se reverront qu’une fois, au cours d’une cérémonie.<
| AFP / JAMAL FARHAT
UN HOMME NE PLEURE PAS. Quand ils avaient 20 ans, quand ils étaient dans les paras, ils croyaient à cette baliverne. Ils avaient ravalé leur chagrin, cadenassé leur douleur, tu leur détresse. Aujourd’hui, ils en ont 50 et se foutent bien du qu’en-dira-t-on. Ils savent que cette pudeur virile n’a fait que les détruire un peu plus, les ronger au plus profond, année après année. Alors, ils pleurent désormais. Ils chialent comme les gosses qu’ils étaient encore, ce 23 octobre 1983, à Beyrouth, quand l’immeuble Drakkar s’est effondré. Leurs copains sont morts. Eux s’en sont tirés, dans le sens où on les a sortis de là, blessés, miraculés, en tout cas vivants. Mais une partie d’eux-mêmes est restée là-bas, ensevelie sous les gravats, la plus belle peut-être : l’insouciance.
Ils venaient de milieux populaires, de petits patelins, de familles nombreuses souvent.