— Par Michèle Bigot —
L’affiche est alléchante, Le Bonheur, spectacle monté par Tatianan Frolova et sa troupe du KnAm, théâtre de Komsomolsk-sur-Amour, on croit rêver! À moins que ce rapprochement de termes ne fasse oxymore pour beaucoup! Le nom est formidablement exotique, pourtant il vient tout droit de l’enfer, cet Orient soviétique qui se recommande surtout pour son Goulag. Le paradoxe s’installe d’autant mieux dans l’esprit que « knam » est un vocable russe qui pourrait se traduire approximativement en français par: « Venez chez nous »!
Mais faisons confiance à Tatiana Frolova. En 1985, pendant la période de la Perestroïka, elle fonde dans sa ville natale de Komsomolsk-sur-Amour le théâtre KnAm, un des premiers théâtres indépendants de Russie. Dans l’ambiance de l’époque, le public lui est plutôt hostile, mais rien ne l’arrête. Après avoir pratiqué les classiques, elle éprouve la necessité de renouveler la forme théâtrale, de trouver une esthétique et une matière propres à toucher les spectateurs contemporains, mue par l’urgence de la situation politique de son pays. Elle se tourne alors vers le théâtre documentaire non sans faire penser au travail de Svetlana Alexievitch.