—Par Daniel Cohen—
En tant qu’humains, nous sommes en conflit intérieur permanent entre désir de gratification immédiate et gestion prudente de nos vies. Ce conflit s’exprime aussi au niveau sociétal. Comment faire en sorte que l’homo economicus en nous prenne les meilleures décisions possibles au plan personnel comme au plan économique ?
Épicure, dont les aspirants au bonheur se croient souvent les disciples, est en accord avec l’idée moderne, qui sera notamment énoncée par Jeremy Bentham au XVIIIe siècle, selon laquelle il faut chercher le plaisir et éviter la douleur. Épicure prend pourtant grand soin de distinguer les plaisirs « en mouvement », liés à la satisfaction d’un besoin, et donc mêlés de douleur, et les plaisirs « en repos », statiques, purs, qui supposent les désirs satisfaits. Platon, dans le Gorgias, est plus radical. La recherche du bonheur souffre à ses yeux d’une contradiction fondamentale : le bonheur a besoin du désir, alors que celui-ci exclut le bonheur. Pour Platon, le bonheur, s’il faut l’appeler ainsi, est la récompense d’une « bonne vie », pas son but.