Dans « L’Éthique », Spinoza énonce une affirmation provocatrice : « Personne n’a encore jamais dit que peut un corps ». Cette phrase, bien que déstabilisante et apparemment iconoclaste, s’inscrit au cœur de sa pensée philosophique et en marque un des fondements essentiels. En défiant les conceptions traditionnelles de la philosophie antérieure, Spinoza nous invite à réexaminer notre rapport au corps et à la manière dont nous le définissons. Au lieu de considérer le corps comme un simple objet matériel, il soutient que l’essence du corps ne réside pas dans sa forme ou sa composition, mais dans ses capacités à agir et à subir. Autrement dit, un corps existe et se définit par ce qu’il peut produire comme actions et ce qu’il peut recevoir comme effets. Cette perspective change radicalement notre manière de concevoir le corps et de le comprendre en tant que processus vivant et dynamique.
Interroger ce que peut un corps, c’est donc questionner les limites et les frontières de cette puissance. Un corps, selon Spinoza, n’est pas un objet passif qui subit sans fin des influences extérieures, mais un acteur dans un monde qui agit, réagit, et interagit.