Tout au long du mois de novembre, l’association Culture Égalité s’est mobilisée à Fort-de-France, à Trinité, au Carbet et à Sainte-Luce dans la lutte contre les violences faites aux femmes, en privilégiant l’échange direct avec la population pour dénoncer et sensibiliser, et surtout mobiliser les femmes et encourager la solidarité entre elles.
En même temps, le 2 décembre, Culture Égalité a réuni autour du thème « Les femmes dans la cité », des élues et militantes associatives afin de sensibiliser celles-ci à la prise en compte, dans les politiques publiques, des situations spécifiques des femmes. Ce séminaire était animé par Danièle Magloire, sociologue des droits humains et féministe haïtienne, qui milite depuis des années pour cette prise en compte et travaille sur les méthodes de collaboration entre société civile et élues.
Le deuxième temps fort de l’association a été l’organisation, sur deux jours, de son séminaire interne qui a réuni une vingtaine de militantes. Il était animé par Danièle Magloire et deux membres de Culture Egalité vivant en France. Nous avons eu le plaisir d’accueillir aussi, durant ces deux jours, la présidente de l’Association Dominica National Council Women, Vanya David, avec laquelle nous avions organisé une action de solidarité suite au passage dévastateur du cyclone Maria dans son pays, en septembre 2017.
Étiquette : Danièle Magloire
Féminismes
Refuser la violence envers les femmes en tout temps et en tout lieu
par Danièle Magloire – Sociologue, féministe haïtienne
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-Dès 1930, les féministes haïtiennes se sont mobilisées. Depuis la résurgence du mouvement en 1986 après la chute de la dictature des Duvalier, la violence spécifique envers les femmes est, dans
une diversité de registres, au coeur des revendications: droit de cuissage et harcèlement sexuel (ouvrières sous-traitance), violence dans les sphères privée et publique (femmes marginalisées), violences conjugale et civile récurrentes, abus sexuels en milieu scolaire, violence pour motif politique. Beaucoup se demandent pourquoi s’attacher à distinguer la violence selon le sexe des victimes. Des apparences trompeuses peuvent laisser croire qu’Haïti n’est pas une société d’obédience patriarcale: matrifocalité, présence marquée des femmes dans l’espace public, taux élevé d’activité économique généralement sans mouvement de retrait/retour sur le marché du travail. Le principe de l’égalité des droits a finalement été consacré en 1987. Dans la pratique, les Haïtiennes sont soumises à un ensemble de contraintes et ont un accès marginal aux ressources (économiques, productives, politiques, temps). Lorsque les agressions envers les femmes s’inscrivent dans le cadre d’attaques contre les populations (violence d’État, de groupes armés), il est relativement aisé de faire reconnaître certaines formes de violence (viols, tortures, séquestration, violences à caractère économique).