Écrivain engagé, essayiste, romancier, historien, reporter, polémiste, sociologue, critique d’art, éditeur, mais surtout poète français contemporain considéré comme l’un des plus grands, Bernard Noël s’est éteint le 13 avril 2021, à l’âge de 90 ans. En 2016, ultime distinction, l’Académie française avait consacré l’ensemble de son œuvre poétique en lui attribuant son Grand Prix de Poésie. Une belle reconnaissance pour celui dont le travail avait été salué en son temps par Louis Aragon.
« Le Bernard Noël que j’ai connu était bardé d’un silence à couper au couteau », écrivait son ami Georges Perros en 1977. Leur Correspondance sera publiée en 1998. Avec cette forte image, Perros met en lumière un paradoxe fondateur : l’œuvre de Bernard Noël, abondante, à la fois inspirée et pensante, s’est construite dans ce rapport violent à l’intériorité silencieuse. Violence dont le langage est l’instrument, l’arme. Dans un entretien avec Claude Ollier, en 1995, il déclarait : « Il n’y a jamais eu pour moi d’en dehors du langage. Il n’y a de l’indicible que parce qu’il y a du dicible ». Ce constat renvoie à l’homme vivant dans son époque autant qu’à l’écrivain, au poète qu’il fut… Vivant dans son époque, car comme nombre de jeunes gens de sa génération, il réagit avec révolte et détermination aux événements du monde, d’Hiroshima à la guerre du Vietnam, des crimes de Staline à la guerre d’Algérie, au cours de laquelle il milite avec les “porteurs de valise” du Réseau Curiel.