Méfiez-vous de l’eau qui dort – et des femmes dociles. Celles qu’on croise dans Autour de ton cou, recueil de nouvelles de Chimamanda Ngozi Adichie, sont aussi radicales qu’imprévisibles. Non pas que, tout à trac, provoquant chalands et caméras, elles se mettent torse nu dans la rue, à la façon des féministes du réseau Femen ; ou qu’elles se lancent, en pleine église, dans un rock endiablé à la Pussy Riot. Non : quand elles tournent le dos à la norme, les femmes de Ngozi Adichie le font sans cri, sans bruit. Elles quittent la scène en solitaire. Leur départ inattendu rompt net avec le passé, comme le fil d’un rasoir.
Elles sont les cousines, version classe moyenne, du petit peuple batailleur et désenchanté de Sefi Atta, dépeint dans Nouvelles du pays (Actes Sud, « Le Monde des livres » du 9 novembre 2012), et de l’adolescence meurtrie racontée par Chris Abani dans Le Corps rebelle d’Abigail Tansi (Albin Michel, 2010). Nouvelle génération, nouvelles manières de voir : du chaudron anglophone du Nigeria, une constellation d’écrivains de haut vol, la plupart installés aux Etats-Unis, est en train de naître.