Qui est Sony Labou Tansi ? Celui que l’on considère aujourd’hui comme l’un des plus grands auteurs africains d’expression française n’est pas né en un jour. Il lui a fallu s’imaginer, se fabriquer, se faire connaître et reconnaître par un Congo en proie aux convulsions de l’Histoire. Tout s’est décidé pour lui à la fin des années 1960, quand son goût de l’expérience créatrice s’est changé en un besoin, toujours plus impérieux, de construire son propre univers, dense et homogène. L’anonyme Marcel Ntsoni invente la figure flamboyante de Sony Labou Tansi, écrivain explosif qui, en marge de l’ordre littéraire, ne craint rien ni personne, dans son projet hyperbolique de fonder une nouvelle littérature. Entre les coups d’État et les fièvres révolutionnaires, le Congo a beau traverser des tempêtes, l’apprenti grand écrivain ne désarme pas. La société devient paroxystique ? À l’écriture d’aller plus loin encore en lui administrant son paroxysme à elle, jusqu’à faire voler en éclats ses normes et ses institutions.
Scénarios existentiels et fictions compensatoires aident le jeune Sony à modeler son oeuvre et son identité, mais l’exposent aussi à de multiples contradictions : affirmer publiquement son statut d’écrivain et assouvir sa haine du régime au pouvoir ; s’attaquer à une France taxée de néocolonialisme et tenter d’y diffuser ses écrits ; démolir les figures d’autorité et partir en quête de conseillers, d’intercesseurs et de pères littéraires.