À propos de « Sank, ou la patience des morts » d’Aristide Tarnagda
— Par Roland Sabra —
Il va mourir, assassiné probablement, et il le sait. Mais la mort ne lui fait pas peur. C’est par elle qu’il vivra, ou plus exactement c’est l’idée de la révolution dont il est porteur qui vivra. Du moins le croit-il. A tort. Comme après toute mort d’un personnage porteur d’espoir, fauché à la fleur de l’âge se construit un mythe. La révélation n’ayant pu s’accomplir totalement, un vide est à remplir. La littérature, le cinéma, les arts en général mais aussi la politique foisonnent de ces vies trop vite abrégées et qui donnent matière à imaginer, à rêver. La mort prématurée du héros est la condition de construction du mythe et c’est même une des caractéristiques essentielles du héros que de manifester un courage qui s’exprime par le mépris pour la mort. Le Christ est mort à 33 ans. Thomas Sankara a été emporté à 37 ans par le coup d’État organisé par Blaise Caompaoré. « Iconographié » à l’égal d’un Patrice Lumumba ou d’un Che Guévara africain son souvenir demeure vivace dans la mémoire d’une jeunesse en mal de vivre au cœur un continent surexploité par les puissances coloniales d’hier et d’aujourd’hui.