Étiquette : Bertolt Brecht

Au TNB, « Grand-peur et misère du IIIe Reich », de Bertolt Brecht

— par Janine Bailly et Paul Chéneau —

Quand le présent entre en résonance avec le passé

C’est à Julie Duclos qu’il est donné d’ouvrir à Rennes la nouvelle saison du Théâtre National de Bretagne. Nous avions aimé le Kliniken, de Lars Norén, qu’elle avait présenté en 2022 dans le cadre du Festival d’automne. Avec une infinie délicatesse, elle y montrait, au sein d’un établissement psychiatrique, le quotidien de treize patients qui, par la parole, trouvaient un chemin de survie. Julie Duclos se mesure aujourd’hui à une œuvre relativement peu jouée de Bertolt Brecht – mais dont on ne saurait dire qu’elle est facile –, Grand-peur et misère du IIIe Reich. De même façon que pour Kliniken, elle fait de la parole la colonne vertébrale de sa mise en scène. Car ici, chaque mot compte, qui selon l’usage qu’on en fait, ou l’interprétation qu’on en donne, peut conduire à la perte de qui l’a prononcé.

Lorsqu’il écrit la pièce, dans les années 30, Bertolt Brecht, chassé d’Allemagne par l’arrivée au pouvoir des nazis, est installé au Danemark.

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Coup de tonnerre au Français

— Par Jean-Pierre Han —

La Résistible Ascension d’Arturo Ui, de Bertolt Brecht. Mise en scène de Katharina Thalbach. Comédie-Française, Place Colette, Paris 1er, à 20 h 30, en alternance. Jusqu’au 30 juin. Tél. : 01 44 58 15 15.

En décidant de faire entrer la Résistible Ascension d’Arturo Ui au répertoire de la Comédie-Française, Éric Ruf se doutait-il que les représentations commenceraient à peine un mois avant les élections présidentielles qui voient la menace de ce que dénonce Brecht (la peste brune) se faire de plus en plus précise ? Si hasard il y a, il est forcément objectif ! La pièce écrite par Brecht en 1941 faisait directement référence au nazisme qui l’avait contraint à s’exiler, en Finlande d’abord où il rédigea son texte en trois semaines, aux États-Unis ensuite. La fable qu’il invente décalque très exactement les faits et gestes qui menèrent Hitler et ses sbires au pouvoir. En France, c’est Jean Vilar qui créa Arturo Ui au TNP, en 1960. Voilà qui tom-bait fort à propos si on veut bien se rappeler ce qui s’y passait alors au plan politique.

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 » La Vie de Galilée « , plus actuel que jamais

— Par Brigitte Enguerand —

la_vie_galileeC’est un soir de janvier 2015, à Lille. Deux semaines exactement après les attentats de Charlie Hebdo et de la porte de Vincennes. La grande salle du Théâtre du Nord est pleine à craquer. Et près de quatre heures durant, cette salle retient son souffle, tant ce qu’on lui raconte résonne avec les interrogations, les angoisses, la stupéfaction, la sidération, ce qu’on vient de vivre.

Le spectacle qui suscite une telle écoute, cette concentration collective tellement intense qu’elle en devient palpable, c’est La Vie de Galilée, de Bertolt Brecht, mis en scène par Jean-François Sivadier avec sa formidable troupe de comédiens. A cette date, le spectacle a déjà 13 ans d’âge. Il semble avoir été créé la veille. Mais, comme un bon whisky ou un bon vin, il s’est bonifié avec le temps. La pièce de Brecht y apparaît plus jeune que jamais, qui conte la vie du savant et la révolution aux conséquences incalculables qu’il a initiée en découvrant que la Terre n’était pas le centre du monde, mais qu’elle tournait autour du Soleil.

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« Chants d’exil »

L'épopée de l'intime

— Christian  Antourel & Ysa de Saint-Auret —
chants_d_exil_afficheTrès connu en Allemagne, grâce à son « Opéra de  4 sous » à la fin des années 1920, Brecht est persona non grata de part ses idées  marxistes et se voit  contraint à l’exil en 1933, lors de l’arrivée d’Hitler  au pouvoir et la montée du nazisme. Commence pour lui une période de quinze longues années où apatride, il erre à travers la Scandinavie du Danemark à la Finlande,  aux Etats-Unis puis en Suisse.

Il est privé  de théâtre et de revenus conséquents. 

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Jeanne Dark contre Pierpont Mauler, du théâtre politique d’avant-hier

—Par Selim Lander—

 Ste Jeanne des AbattoirsPour les lecteurs de Madinin’art qui n’auraient pas vu la pièce de Brecht présentée la semaine dernière au Théâtre municipal, c’est bien de Sainte Jeanne des Abattoirs qu’il sera question ici. Les ravages du capitalisme sauvage, plus particulièrement dans sa version mafieuse du Chicago des années vingt sont bien connus. Ils l’étaient certes moins quand Brecht écrivit sa pièce, en 1931 ; celle-ci possédait donc incontestablement à l’origine une force politique hélas disparue. Qui pourrait en effet se montrer encore naïf à l’heure de la mondialisation, des délocalisations et des paradis fiscaux, à l’égard d’un capitalisme qui affiche désormais son cynisme sans la moindre vergogne ? Cela étant, c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleurs onguents, paraît-il, ce qui signifie en l’occurrence que les sujets ne sont jamais démodés au théâtre. Il n’en va pas de même de la manière de les traiter, et bien que le signataire de ces lignes n’ignore pas que nombreux sont ceux qui voient dans Brecht un auteur génial et au génie indémodable, il considère pour sa modeste part que si Brecht fut un auteur incontestablement important, qui a marqué l’histoire du théâtre, la plupart de ses pièces sont au contraire démodées.

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Brecht prend un coup de jeune

—Patrice Trapier —
la_bonne_ame_de_setchouanAvec l’adaptation de « La bonne âme de Se-Tchouan » de Bertolt Brecht par Jean Bellorini, on a tout pour être heureux.
Une troupe de comédiens qui jouent, chantent et se dépensent sans compter; trois excellents musiciens qui, à la manière de Kurt Weill, ponctuent, accompagnent et s’intègrent à la pièce; un texte aux innombrables échos contemporains; un dispositif scénique beau, puissant, multiple. Shen Té est prostituée dans la capitale du Se-Tchouan, c’est en partie la Chine, en partie l’occident, en partie hier (la pièce a été écrite entre 1938 et 1940), en partie aujourd’hui. Les textes de Bertolt Brecht ont valeur de fable.

Trois Dieux chez Brecht, un seul chez Bellorini incarné par Mel Hondo, la voix française d’Eddy Murphy et Morgan Freeman, cherche(nt) désespérément une bonne âme. Sera-ce Shen Té, malgré son métier de prostituée, malgré les embûches que vont lui tendre les pauvre qui l’entourent (il n’y a jamais d’angélisme chez Brecht, les lois qu’il dénonce s’appliquent à tous), ses ruses, son dédoublement avec le cousin Shui Ta. Karyll Elgrichi incarne ce double rôle avec force, tendresse, fragilité.

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