L’avocate Samia Maktouf, connue pour avoir représenté plusieurs parties civiles au procès des attentats du 13 novembre, appelle à défendre les droits des femmes partout dans le monde. Voici sa tribune, parue ce jour dans le JDD :
« Voilà cinq ans, la révolution #MeToo secouait une planète où les abus sexuels des hommes sur des femmes cherchant un emploi avaient jusqu’alors paru acceptables, un « droit de cuissage » nécessaire pour construire une carrière, un « mal nécessaire » pour toute femme qui voulait exister. Après l’affaire Harvey Weinstein, chacun, et surtout chacune, avait la conviction que rien ne serait jamais plus pareil. Mais si ces cinq ans sont un anniversaire, l’état des droits des femmes à travers le monde montre qu’ils ne sont pas une fête.
Le meurtre de la jeune Mahsa Amini en Iran le 13 septembre dernier, battue à mort à Téhéran par la « police des mœurs » pour un voile mal ajusté, a révolté une population qui subit depuis plus de quarante ans les diktats religieux des ayatollahs. Mahsa Amini, qui était également issue de deux des minorités religieuses et ethniques de l’Iran perse et chiite – la minorité musulmane sunnite et la minorité kurde. Sa mort en détention n’en prend que plus de résonance encore, puisque mettant en lumière la question du respect des minorités dans une dictature théocratique qui, fidèle à elle-même, se montre capable de faire battre à mort une jeune femme pour un voile révélant trop ses cheveux.
Pour les Talibans d’aujourd’hui et d’hier, la femme est une burqa
Comment ne pas s’y attendre de la part d’un pays qui se veut une république issue d’une révolution populaire mais entretient dans ses institutions une « police des mœurs » comme la hisba qui appuie la terreur d’Al-Qaïda au Maghreb islamique, particulièrement au Mali, ou celle qui existait dans l’ancien « califat » de Daesh et existe (à nouveau) également dans l’Afghanistan des Talibans voisin de l’Iran ?
L’Afghanistan, où le 15 août dernier a marqué le premier anniversaire du retour au pouvoir des Talibans, avec toutes les privations qu’implique leur tyrannie envers les Afghanes dans tous les domaines de l’existence. Il est interdit aux femmes de travailler et il est interdit aux filles d’aller à l’école, littéralement sous peine de mort. Le 30 septembre dernier, l’attaque d’une école à Kaboul a tué plus de cinquante personnes, parmi lesquelles une majorité de jeunes filles de l’ethnie hazara qui ne demandaient qu’à faire ce à quoi tout enfant au monde a droit – apprendre.
Malgré toutes leurs promesses d’être différents de leurs prédécesseurs chassés vingt ans plus tôt, les Talibans d’aujourd’hui sont un copié-collé de ceux qui abritaient Osama bin Laden quand le World Trade Center s’est effondré. Pour les Talibans d’aujourd’hui et d’hier, la femme est une burqa.
En Iran, au Mali, en Afghanistan et ailleurs, les femmes subissent le joug d’un seul et même mal, que l’on ne veut pas nommer. Ce mal, c’est l’islam politique radical, une idéologie ravageuse et fasciste, celle-là même qui impose de haïr l’être humain quel qu’il soit. Il faut le nommer, lui donner le nom qu’il porte. Comme le disait Camus, « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ».
Les Iraniennes brûlent leurs voiles, les Afghanes refusent que les Talibans les leur imposent. C’est à l’autre bout du monde, mais notre propre Occident, si sûr d’être le phare et rempart universel du respect des droits des femmes, est-il toujours bon conseiller en la matière ?
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