— Par Claire Lesegretain (avec AFP) —
Le tribunal administratif de Cayenne a rejeté, jeudi 27 décembre, la requête de la collectivité territoriale de Guyane (CTG) qui réclamait 7,6 millions d’euros à l’État, au titre des rétributions qu’elle a versées aux prêtres catholiques de 2009 à 2015.
La décision est tombée en Guyane pendant les fêtes, le 27 décembre. Le tribunal administratif de Cayenne a rejeté la requête de la collectivité territoriale de Guyane (CTG) qui réclamait à l’État de lui verser 7,6 millions d’euros au titre des rétributions qu’elle a versées aux prêtres catholiques de 2009 à 2015, ainsi que 20 millions d’euros « au titre du préjudice subi du fait du régime juridique » en vigueur en Guyane.
En effet, la Guyane est toujours régie par une ordonnance royale de Charles X du 27 août 1828 posant le principe de la rémunération des prêtres catholiques par la collectivité publique. Par une loi des finances du 13 avril 1900, le parlement avait, par la suite, transféré cette charge financière au budget de la colonie devenu département de la Guyane en 1946, puis à la Collectivité territoriale de Guyane (CTG), fruit de la fusion de la région et du département fin 2015.
Un traitement équivalent à celui des fonctionnaires de catégorie C
La loi de 1905 de séparation de l’Église et de l’État a été étendue par un décret d’application à la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion en février 1911, mais pas en Guyane. En mai 2014, le conseil général avait cessé unilatéralement de payer les 1 500 € mensuels qui constituent le traitement des prêtres catholiques du département payés comme des fonctionnaires de catégorie C.
En Guyane, la justice somme le département de continuer à payer les prêtres
Huit mois plus tard, le tribunal administratif de Cayenne donnait raison aux 26 prêtres dont la rémunération avait été suspendue en mai par le conseil général. Mgr Emmanuel Lafont, évêque de Cayenne, s’était dit toutefois prêt à négocier la sortie de ce privilège, un héritage de la Restauration ne correspondant plus, selon lui, à la nouvelle société guyanaise.
Les prêtres guyanais continueront d’être payés par le département
De fait, depuis 2016, un accord tacite entre Rodolphe Alexandre, président (Divers gauche) de la CTG, et Mgr Lafont concrétise une diminution progressive du nombre de prêtres à la charge de la collectivité : les successeurs des prêtres qui quittent leur paroisse ne sont plus rémunérés par la CTG.
« Aujourd’hui, 13 prêtres sur 43 sont encore rémunérés par la CTG, les 30 autres étant à la charge du diocèse. Les dons des chrétiens aident largement à cela », a expliqué Mgr Lafont à l’AFP.
Seulement 1,26 % des charges de personnel de la collectivité
Dans la décision du 27 décembre que l’AFP s’est procurée, le tribunal administratif s’appuie notamment sur une décision du Conseil constitutionnel du 2 juin 2007, jugeant cette singularité guyanaise « conforme à la Constitution ». Le tribunal souligne également que les dépenses liées aux rémunérations des prêtres ne représentant que « 1,26 % des dépenses » des charges de personnel de la collectivité.
Rodolphe Alexandre a déclaré qu’il ne ferait pas appel de la décision du tribunal, qui fait suite à une requête en indemnisation déposée en mai 2015 par le conseil général.