— Par Selim Lander —
Quelques mots sur la pièce de ces deux danseurs chorégraphes, « Soyez vous-mêmes », car il serait dommage qu’elle sombre immédiatement dans l’oubli. Madinin-art sert aussi cela, à garder la mémoire des divers spectacles et manifestations culturelles qui ont eu lieu en Martinique. Son directeur, Roland Sabra, tient en effet à ce que les rédacteurs du site s’efforcent de couvrir tous les événements un tant soit peu notables, ceux qui leur paraissent réussis comme ceux qui, de leur point de vue, le sont moins. La critique n’étant pas un exercice entièrement objectif (même si elle l’est sans doute davantage qu’on le croit) les avis peuvent diverger à cet égard et c’est pourquoi il n’est pas rare qu’un même spectacle donne lieu à des commentaires opposés. Telle est la règle du jeu et cela doit simplement conforter le lecteur dans l’idée qu’il peut lui aussi avoir son avis et un avis divergent de celui (ou ceux) défendu(s) sur le site.
Ne nous laissons pas entraîner dans notre manie de la digression… Quoique. Quoiqu’il faille accepter que la liberté du critique existe aussi et que ce qu’il a à dire sur tel ou telle question a priori sans rapport direct avec le spectacle qu’il est censé « couvrir » n’est peut-être pas moins intéressant que le spectacle … en question.
Mais revenons à nos moutons. Ils sont deux. Chantal Loïal, d’origine guadeloupéenne et passée par l’Afrique, et que le public martiniquais connaît déjà, est à la tête de la compagnie Difé Kako avec laquelle elle monte des pièces qui, à l’occasion, permettent au public de s’essayer lui aussi aux mouvements de base de la danse africaine. Récemment, elle a elle-même interprété en solo la Vénus hottentote. Pour « Soyez vous-mêmes », elle est présente sur scène avec un partenaire, danseur et chorégraphe comme elle, Matthias Groos (compagnie 29×27). On aperçoit également un paquet de longues baguettes ou plutôt des lambris qui peuvent s’imbriquer les uns dans les autres. Défaits, recombinés, ils serviront à construire et déconstruire un décor rudimentaire et éphémère.
La pièce organise par ailleurs le dialogue entre les deux interprètes, un dialogue verbalisé qui évoque en particulier le parcours de Chantal Loïal sur le continent africain. Dans les passages dansés, cette dernière ne manque pas d’énergie mais n’innove guère dans sa chorégraphie par rapport aux danses traditionnelles qui sont la spécialité de sa compagnie. On n’en dira pas autant de son partenaire qui pratique une danse contemporaine toute en force et bondissante. Deux approches de l’art chorégraphique trop éloignées l’une de l’autre pour faire un mariage vraiment harmonieux.
Le meilleur de la pièce est la fin, les deux danseurs enfin accordés dans une évocation stylisée des « bals poussière » qui font le charme des « quartiers » des villes africaines, petites ou grandes.
Fort-de-France, Tropiques-Atrium, 19 novembre 2015.