— Par Lucien Cidalise Montaise —
Notre 5e saison arrive à grands pas, faisant oublier les quatre autres, essentielles elles aussi : la Noel, le Carnaval, les Pâques et les Grandes Vacances ! Il s’agit des élections pour la Collectivité Territoriale de Martinique. Très particulières, car d’une grande clarté , elles sont comme l’auberge Espagnole, dont on ne sait pas grand-chose. Et ce malgré les efforts de tous.
Même d’anciens parlementaires toutes tendances confondues s’y sont mis et appellent la population à une lecture permettant « une vision appropriée du développement du territoire » (sic) et l’incitent à faire le choix « d’une action politique pour un mieux vivre ensemble » ! (ré sic) ! . Donnent-ils raison à Césaire qui affirmait en parlant de ces dirigeants de Gauche « Ce sont des libéraux sans fanatisme » ! Bouleversant en effet. Le changement souhaité par ces nouveaux réclamants, ne doit en rien remettre en cause l’actuelle orientation conventionnelle, sinon banale du développement territorial de la Martinique. En aucun cas, aspirer à dévier cette politique affectueuse ! de reconnaissance de notre profonde attente qui ne brisera jamais la Solidarité Nationale !!!
La Martinique doit rester pour eux ce qu’elle est « un lambeau palpitant sous d’autres cieux… », même atteinte d’une faiblesse respiratoire chronique nécessitant des soins spécifiques et urgents. Cette nouvelle classe à qui s’adressent nos ex, doit pousser à effectuer la rencontre de toutes les catégories sociales allant du Capitaliste (bien portant) à la classe défavorisée en passant par celle dite moyenne et la Bourgeoisie.
Elles ne devront plus se prétendre en concurrence, ni sociale, ni politique, encore moins économique. Une « vision apaisée » doit conduire dorénavant toute approche des uns vers les autres. Adieu la lutte des classes… Elles aspireront maintenant aux mêmes droits et devoirs que ceux de France. Leur rêve âgé de 70 ans : la Neige ! Alors pourquoi en réclamer d’autres qui les amèneront inéluctablement au détriment de l’émancipation collective de tout un peuple ? La possibilité d’affirmer la participation de tous les Martiniquais au fonctionnement d’une autre politique dans leur pays n’a jamais été considérée comme vitale.
Cette absence criante de Programme nous interpelle et nous hurle aux oreilles. Tous les risques d’adaptation qui se trouvent pousser comme herbes folles sur le trajet de la Responsabilité pour les politiciens à cours « d’idées courtes ! » disparaitront par l’assistance de qui vous savez ! Il y aura grâce à l’apaisement, fin en soi la résolution de nos épineux problèmes avec un changement de « zone de tirs ». Les différents acteurs des conflits et revendications se cotiseront pour viser la même cible. La nouvelle Assemblée vierge de tout affrontement, donc sans gilet pare-balles. Il faudra donc impérativement que nos Politiques, les 51, précisent le contenu de leur rêve et ambition. Ils devront politiser leurs convictions et les enjeux quotidiens.
Cesser ou non de légitimer et reproduire le système politico-économique néo- libéral meurtrier pour notre peuple et imposé par l’autre. Pousser ou non à la vision le peuple qui doit en permanence s’affronter face à son miroir, à son Histoire si lapidaire. S’affirmer enfin et apprécier sans ajouts d’ailleurs les résultats de toutes confrontations fraternelles. Avoir en permanence les armes du passé et s’en servir pour ceux qui en ont été les acteurs au moins. Qui se souvient des luttes qui se sont succédées juste après la libération (45-75) ? A la Martinique d’abord et au Viet-Nam, Algérie, Tunisie, Madagascar, Cuba… ? Ces traces de luttes qui ont fini ensevelies sous la poussière des conflits, balayées par la déferlante de la Corruption, figeant bon nombre de pays pourtant triomphants de l’exploitation, devenus ce jour les puits généreux du Capitalisme ?
La Martinique en est aujourd’hui un pitoyable exemple. Que sommes nous devenus ? Un pays figé, sclérosé. Comme seule richesse : l’ivoire de ses dents exhibé à tout va sur de petits écrans qui se veulent culturels. Un pays malgré tout maussade et superflu…vivant du Paternalisme, sans honte des pays « gwan zong ! » qui gèrent le monde. Ne pouvant refuser de choisir, tout nous est octroyé car stratégiquement envisagé, puisque fondamentalement nécessaire pour « l’équilibre du monde de l’argent ».
Nous serons toujours « des lambeaux de la France palpitants sous d’autres cieux » ! comme le minaude tous les jours une jouvencelle au service d’une télé locale « que Dieu bénisse la Martinique ! ». A cette réalité vient s’accoler cette décoiffante singularité : l’arrivée sur le marché de nombreux Martiniquais, enfants de batailles séculaires de leurs aînés qui affichent aujourd’hui leur conscience et s’acoquinent à des idéologies réactionnaires orientées vers l’individualisme, la passion incontrôlée de l’Argent, l’égoïsme et l’exploitation de l’autre. Il est donc impossible de croire, donc de postuler à l’existence d’une communauté Martiniquaise singulièrement « nationaliste » et prétendre à l’existence d’une masse populaire homogène, qui se situerait à gauche de notre échiquier politique.
Tensions poussées à l’extrême, chacun utilisant ses armes. D’un côté la dissuasion par l’argent enveloppée d’hypocrisie complice, de l’autre la pression par les forces Politiques, Syndicales et Sectaires, très intégrées au système qui nous gère, scotchés à l’organisation politique , sociale, économique et syndicale française. Les schémas adoptés le sont avec la fidélité de l’épouse aimante mais sourde et muette. Nos intérêts sont devenus ceux des Européens. Les courbures fondamentales devant le slogan républicain « liberté, égalité, fraternité » atteignent le même degré d’allégeance ici comme ailleurs. Césaire avait suggéré « solidarité ».Nos régisseurs, comptables de nos désirs n’ont toujours pas compris. Alors : posons nous la question. Le peuple Martiniquais peut-il prétendre à une rhétorique axée sur une unité d’action et de pensée libératoire ? Tous les vieux peuples ont utilisé la cohérence et l’expérience pour s’émanciper : colonne vertébrale de tout progrès.
Les Martiniquais devront courageusement postuler à l’affirmation de leur originalité, donc de leur existence malgré leur jeunesse. Ils devront arrêter d’argumenter métaphysiquement , car les symboles ont rarement effet de dévoiler leur véritable contenu. Ils ne devront plus se contenter de savoir « jouer du tambour ou danser du bèlè ». Ils devront choisir.
Adopter comme pour un enfant. Préférer comme pour une femme. Opter comme pour une profession.
Choix douloureux ou calculateur mais historique. Ils devront cesser de voir la « métropole » comme une vache blasée aux pis gonflés artificiellement.
Les Martiniquais doivent voir la France comme une partenaire à qui ils offrent affection et potentialité.
Cessons de croire que le symbole du Beau s’appelle les Champs Elysées, nous avons le Rocher du Diamant
Ensemble, mais du même pas, les Martiniquais et les Français réclameront à leur tour, à la face du monde :
« Préservez cet Etat du malheur »
Lucien Cidalise Montaise
Diamant (Mars 2015)