Poitiers – Empêtrée dans une polémique sur l’islamo-gauchisme, Frédérique Vidal a remis mardi la question des étudiants au centre des débats en annonçant que les protections périodiques seraient bientôt gratuites pour toutes, une mesure supplémentaire de lutte contre la précarité des jeunes.
Dans les prochaines semaines, les résidences universitaires des Crous et les services de santé universitaires seront équipés en distributeurs de protections hygiéniques, a annoncé Mme Vidal lors d’une rencontre à Poitiers avec des étudiants. « On vise 1.500 distributeurs et une gratuité complète à la rentrée de septembre« , a-t-elle ajouté.
Un objectif « ambitieux » mais réaliste, selon elle, pour une mesure « pérenne » dont le coût est estimé autour de 15 millions par an.
« Longtemps invisible, la précarité menstruelle étudiante est une injustice que nous ne pouvons plus tolérer« , a déclaré sur Twitter le président Emmanuel Macron.
« Victoire« , s’est de son côté félicité le syndicat étudiant Unef, qui juge cette mesure « essentielle pour lutter contre la précarité menstruelle » mais sera vigilant à ce que « ces distributeurs soient présents dans le plus d’espaces possibles« .
Satisfaction aussi parmi les étudiants présents lors du débat à Poitiers: « Il y a énormément d’étudiants, d’étudiantes qui sont dans des situations d’extrême précarité et qui n’ont pas les moyens de subvenir à ce besoin primaire », estime Maëlle Nizan, étudiante en 3e année de licence STAPS.
« Pas trop tôt !« , lance de son côté Jasmine Imbert, étudiante en 2e année de licence de biologie. « Je suis concernée parce qu’étudiante et femme, mais si ça pouvait s’étendre à toutes les femmes, celles qui n’ont pas les moyens, ce serait bien« , ajoute-t-elle.
Cette annonce intervient alors que la ministre est apparue fragilisée ces derniers jours, après la polémique suscitée par sa demande d’une enquête sur « l’islamo-gauchisme » à université, confiée au CNRS (Centre national de la recherche scientifique).
– Initiatives locales –
Mardi, non loin de la préfecture de Poitiers où se tenait le débat, une centaine d’étudiants et de lycéens se sont brièvement rassemblés en criant « Vidal démission« .
Semblant pressée de tourner la page de ce « procès d’intention« , la ministre rappelle que sa « priorité« , « ce sont les étudiants« .
La gratuité des protections périodiques dans l’enseignement supérieur a été décidée après un travail de concertation avec des parlementaires, organisations étudiantes représentatives, ou encore l’association Règles Elémentaires.
Un tiers des étudiantes aurait besoin d’aide pour pouvoir acheter des protections périodiques, selon une étude réalisée en février par l’Association fédérative des étudiants de Poitiers, l’Association nationale des étudiants sages-femmes et la Fage.
En novembre, l’Ecosse est devenue le premier pays à mettre à disposition des protections périodiques dans tous les bâtiments publics.
Jusqu’à présent en France, des initiatives existaient mais restaient souvent locales. Début février, la région Ile-de-France a ainsi annoncé que les facs et les résidences étudiantes sur son territoire seraient bientôt équipées en distributeurs gratuits de protections périodiques bio.
Cette mesure s’ajoute à d’autres, prises en faveur des jeunes, durement touchés par la crise sanitaire. En janvier, Emmanuel Macron avait annoncé la création d’un « chèque psy » pour les étudiants. Il a concerné la première semaine de février 1.200 étudiants, puis 2.000 étudiants par semaine, selon Mme Vidal.
Le chef de l’Etat avait aussi annoncé la mise en place de deux repas par jour à un euro dans les restos U pour tous les étudiants, pas seulement les boursiers.
Des avancées « insuffisantes » aux yeux d’organisations comme l’Unef, qui réclame un « plan d’urgence » d’1,5 milliard d’euros.
« Nous avons doublé le montant des aides d’urgence; tout étudiant qui en a besoin peut obtenir une première aide de 500 euros« , a aussi rappelé Frédérique Vidal mardi, interpellée à plusieurs reprises sur le sujet de la précarité.
La ministre s’est en revanche montrée défavorable à l’idée, réclamée par plusieurs organisations de jeunesse, d’introduire un RSA (revenu de solidarité active) pour les jeunes de moins de 25 ans en recherche d’emploi.
Plusieurs syndicats étudiants et organisations politiques de gauche appellent à une nouvelle mobilisation de la jeunesse le 16 mars en France pour obtenir de nouvelles mesures contre la précarité.