Nous nous croyions très savante en écrivant, hier, que si les prix des billets de train ou d’avion augmentent d’une minute à l’autre, ce n’est ni l’effet de la magie noire ni celui des mauvaises ondes, mais celui du « yield management ». Un très grand nombre de lecteurs nous ont fait observer que c’est surtout celui du « IP tracking ».
Voici notamment ce que nous écrit Antoine, qui semble un bon connaisseur du sujet : « Le yield management [ou optimisation de la recette tarifaire, NDLC] n’est qu’une partie de la réalité, celle mise en avant par les opérateurs de transport.
« Il y en a une autre, moins connue du grand public mais utilisée pratiquement partout, qui mériterait largement une enquête approfondie et une communication grand public qui aurait sa place dans un journal comme Le Monde ».
« Cette autre réalité qui explique les variations rapides de prix sur internet (toujours à la hausse), c’est l’IP tracking (attention il n’y a pas de terminologie universellement adoptée, il y a donc plusieurs noms).[On peut traduire par ‘pistage d’IP’, NDLC]
« Son principe est simple : quand vous faites une recherche de billets, l’opérateur enregistre cette recherche et l’associe à l’adresse IP du terminal que vous utilisez (ordinateur, smartphone, etc.). Il vous propose alors un prix « p » qui correspond au modèle de yield management habituel (Voir la note d’hier : plus le train se remplit, plus les prix montent, NDLC]. Si vous réalisez la transaction, vous payez ce prix « p », fin de l’histoire.
« Mais si vous n’achetez pas immédiatement, et que vous réessayez un peu plus tard, l’opérateur a gardé en mémoire que vous aviez manifesté un intérêt pour ce trajet, et il vous propose alors un prix un peu supérieur « p+e », ceci afin de susciter l’achat immédiatement en vous laissant penser que le nombre de places diminue et que le prix augmente. Et ceci même si aucun changement n’a eu lieu, même si aucun autre client ne s’est manifesté. Il s’ensuit une logique incrémentale : plus vous allez réitérez la simulation, plus le prix va augmenter – toujours par petit palier. L’objectif est très clair : provoquer la vente. Et ça fonctionne très bien.
« Pour vérifier cette pratique, c’est très simple : il suffit de réaliser la même simulation de billets à partir du même terminal, plusieurs fois successivement (en les espaçant un minimum, les opérateurs cherchant à éviter que la méthode ne soit trop visible). Le prix va ainsi passer de 100, à 105 à 115 euros.
A ce moment là, réalisez la même simulation depuis un autre terminal, avec une connexion distincte (attention aux smartphones en wifi qui peuvent partager la même connexion), et là…surprise ! Le prix n’est pas le même, il est de retour à 100 euros.
« Cette méthode n’est à ma connaissance pas pratiquée par la SNCF en France, par contre c’est un grand grand classique des compagnies aériennes, et de certains autres opérateurs ferrés en Europe. C’est quasi systématique sur les compagnies locales en Asie notamment. «
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