Pourquoi les épargnants Guadeloupéens et Martiniquais doivent impérativement réinvestir le secteur bancaire et financier  ?

— Par Jean-Marie Nol, économiste et ancien directeur de banque —

Le secteur bancaire et financier en Guadeloupe est un secteur économique d’importance, car il accompagne le développement rapide de la consommation locale, qui est le moteur de l’économie antillaise. Il s’est développé au xixe siècle sous la forme du Crédit foncier colonial puis de la future Banque de la Guadeloupe, fondée au lendemain de la deuxième abolition de l’esclavage . Il est aujourd’hui supervisé par l’Institut d’émission des départements d’outre-mer, qui représente la Banque de France localement. Le système bancaire de la Guadeloupe présente une structure proche de celle observée en France métropolitaine. Ainsi, les principaux établissements de crédit français sont représentés sur le territoire, avec plus d’une dizaine d’établissements installés. Ils emploient environ 1500 salariés fin 2023 , soit près de 2 % de l’emploi salarié marchand total.

A l’orée des années 2000 , la disparition dans le paysage bancaire et financier de la Guadeloupe des sociétés financières de développement SODEGA et SODERAG qui  ont grandement contribué au développement des entreprises de production en Guadeloupe annonce un changement dans le paysage bancaire local, impacté également par l’arrivée de nouveaux concurrents bancaires et non bancaires (comptes Nickel, Orange , assureurs, crowfunding etc.). Nonobstant les raisons qui ont présidé à la disparition des sociétés financières de développement en Guadeloupe , aujourd’hui l’heure est venue de remettre l’ouvrage sur le métier car l’avenir de la Guadeloupe est riche de potentialités en ce sens que d‘après certaines informations top secrètes dévoilés par le magazine sciences et techniques, le plafond océanique de la Guadeloupe  devrait recèler des ressources minérales, qui suscitent les convoitises. C’est dans ce contexte d’avenir pour la Guadeloupe que le président Emmanuel Macron s’est dit prêt à investir près de 10 milliards dans l’exploration des fonds marins des régions d’outre-mer . Car les enjeux sont nombreux et la France est en retard dans le domaine.Et la France a de quoi explorer… puisqu’avec les Outre-mer elle a le deuxième plus grand espace maritime au monde.La prochaine ruée vers l’or risque bien d’être sous-marine. Alors, aujourd’hui, aller installer une mine à plus de 1000 mètres sous l’eau, ca n’est pas encore techniquement faisable ni rentable. Mais l’enjeu n’a pas échappé aux industriels et aux états.
La Norvège par exemple, a pris un tour d’avance et vient d’ accorder le 9 janvier 2024 des licences à des entreprises intéressées par cette exploitation minière en eau profonde. Ni les innombrables tribunes, publiées par les scientifiques, avertissant des risques pour des écosystèmes encore très mal connus, ni la manifestation, organisée par plusieurs associations de défense de l’environnement, mardi 9 janvier, devant le Parlement à Oslo, n’y ont rien changé. En milieu d’après-midi, quatre-vingts députés contre vingt ont approuvé la proposition du gouvernement qui, à terme, pourrait faire de la Norvège le premier pays au monde à exploiter commercialement les ressources minérales nichées dans son socle continental.
Le Japon a des plans similaires pour 2026. Au Canada, une entreprise a levé 150 millions de dollars pour explorer le Pacifique. La course est lancée et la France cherche à rattraper le peloton.
 Du nickel, du manganèse ou du cobalt, présent sous forme de nodules polymétalliques, mais aussi des terres rares, ou encore des amas sulfurés contenant du zinc, du cuivre ou de l’or. Des métaux utilisés dans le cadre de la transition énergétique pour fabriquer véhicules électriques et panneaux solaires. Ces ressources minières marines se retrouvent pour l’essentiel dans les îles volcaniques . Ainsi le volcan actuel de la Soufrière et les volcans sous marins au large de Bouillante et de la Désirade sont formé en majeure partie de matériaux de 1.6 à 1.8 million d’années. Les roches les plus récentes sont des dépôts pyroclastiques constitués de fragments de lave, de scories et de ponces. Ces dépôts sont surtout présents sur les flancs nord-est et sud de la Guadeloupe et peuvent atteindre jusqu’à deux mille mètres de profondeur.
Leur faciès contient des clastes de quelques centimètres de diamètre, avec une forte proportion de ponces, insérés dans une matrice sableuse. Des matériaux rares exploitables prochainement avec l’évolution des technologies  et qui sont potentiellement abondants dans certaines  îles des Antilles. ( Études et recherches en cours ). Toute cette recherche, c’est la mission de l’Ifremer, l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer qui envoie des robots et des drones sous la mer. Le tout dernier s’appelle ULYX, il est doté d’intelligence embarquée, il a coûté plus de 5 millions d’euros, il peut rester seul sous l’eau pendant 48h et aller jusqu’à 6.000m de profondeur, pour prendre toutes sortes de mesures.
L’on pourrait aussi bientôt découvrir dans les Antilles d’autres types de matériaux rares  tel l’iridium  trois fois plus cher que l’or exploitables prochainement avec l’évolution des technologies  et qui sont potentiellement abondants dans certaines  îles des Antilles.
Ce métal vaut, aujourd’hui, plus que l’or et le Bitcoin. Sa résistance aux températures élévées et à la corrosion le rend presqu’indispensable dans la fabrication des moteurs d’avions, des pipelines en eau profonde.Utilisé dans plusieurs industries l’iridium est l’un des métaux les plus rares de la terre. Découvert pour la première fois en 1803 par Smithson Tennant. Le métal est connu pour sa forte résistance à la corrosion, son point de fusion élevé et sa dureté. Ces caractéristiques le rendent particulièrement adapté à certaines applications industrielles.Sa résistance aux températures élevées et à la corrosion le rend presqu’indispensable dans la fabrication des moteurs d’avions, des pipelines en eau profonde, des convertisseurs catalytiques automobiles. Il est utilisé aussi en quantité variée dans la fabrication des appareils médicaux et électroniques, des bougies d’allumage, des montres et des boussoles.
En effet, l’iridium est notamment utilisé dans la fabrication d’alliages à haute résistance et pouvant supporter les hautes températures. Très souvent, il est inclus dans les alliages de platine en tant qu’agent durcissant. L’un des plus grands raffineurs de métaux du groupe platine au monde, Heraeus Precious Metals, affirme que l’iridium est aussi employé dans la fabrication des smartphones 5G, et des produits haut de gamme nécessitant l’utilisation de diodes électroluminescentes organiques (OLED), rapporte BBC. « L’iridium est également performant pour assurer la désinfection de l’eau embarquée par les navires dans leurs ballasts. Mais aussi dans le domaine de l’énergie, notamment pour la fabrication des piles à hydrogène »,
L’ exploitation  des fonds marins de la ZEE de la Guadeloupe serait un levier pour l’accompagnement de la mutation de l’économie de consommation  vers la production . Le tout avec la création de milliers d’emplois à la clé  pour la Guadeloupe.
Compte tenu de cette potentielle manne minière providentielle , les banques et organismes financiers devraient poursuivent leur effort d’investissement en matière de modernisation et d’automatisation de leurs implantations pour être en mesure de financer les entreprises de production. Les établissements de crédit installés localement gèrent déjà plus de un million de comptes de dépôts ou d’épargne fin 2023 (soit à peu près  2 comptes de dépôts ou d’épargne par habitant).Les crédits ont bien été ces dernières années les piliers de la croissance avec  une intermédiation bancaire en transformation et surtout une augmentation significative de l’épargne des Guadeloupéens pour un montant record en 2023 de près de 5 milliards d’euros . Croissance des crédits et de l’épargne ainsi que croissance économique sont étroitement liées à la Guadeloupe . Après une période de croissance très soutenue, la crise inflationniste actuelle depuis 2 ans  marque une rupture et le basculement dans un environnement d’octroi de crédit plus contrôlé et sélectif.Les prêteurs institutionnels se voient jouer un rôle grandissant, les financements partagés se développent et des offres alternatives de financement se mettent en place en complément du crédit bancaire traditionnel, devenu plus sélectif. Il résulte de ce resserrement du crédit et de l’augmentation des créances douteuses et litigieuses que la valeur comptable des banques des Antilles sera demain inférieure à leur valeur boursière. Ce constat est particulièrement alarmant en ce qu’il augure que les banques en Guadeloupe filiales des grandes banques françaises pourraient demain ne plus avoir les moyens de leur développement. Dans ces conditions, li serait plus qu’opportun et urgent de revoir d’urgence cette affaire de la filialisation de nos banques des Antilles.C’est un problème pour les banques, bien sûr, mais aussi pour la France en tant que puissance économique et politique, car la banque n’est pas une industrie comme les autres. L’industrie bancaire  a un rôle majeur à jouer dans le financement de l’économie Guadeloupéenne et de ses grandes transitions, notamment énergétique et écologique, dans la transformation de son épargne, dans la circulation des capitaux au sein de la zone Caraïbes et, plus généralement, au service de la souveraineté de la Guadeloupe dans les décennies à venir. C’est pourquoi les élites politiques et économiques de la Guadeloupe se doivent de réinvestir le secteur bancaire et financier , aussi voilà pourquoi j’appelle toutes les parties prenantes de l’écosystème bancaire européen à un effort majeur de réinvention de l’économie de la Guadeloupe . Cet effort doit être partagé entre les acteurs industriels  qui doivent simplement redresser leur performance opérationnelle et financière ,les banques de la place qui tout en continuant leur transformation digitale -doivent relever le défi du financement des entreprises de production, et les décideurs publics – qui doivent renouer avec l’ambition  de la SODEGA et SODERAG dont l’objectif était un secteur financier public  restructuré qui soit le pendant du secteur bancaire classique .
. »Lanmou fré yanm plen kwi. »
– traduction littérale :  Amour frais, l’igname remplit le coui.
– moralité : Se dit d’une motivation débordante pour quelque chose de nouveau.

Jean marie Nol économiste et ancien directeur de banque