Pour une politique de soutien aux métiers du cinéma et de la production cinématographique

 

— Par Olivier Baudot Montézume

Association Martiniquaise pour le développement

du cinéma en court métrage

(As Loi 1901 No 9721004112 – SIRET No: 435 055 157 000 18)

Fort de France le 21 juin 2008

M Alfred Marie Jeanne

Pdt du Conseil Régional de

Martinique

Rue Gaston Deferre

Objet : Pour une politique de soutien aux métiers du cinéma et de la production cinématographique

Monsieur le Président,

Créole en court vient de participer en tant que co-producteur à la réalisation du court métrage « Au nom du père » que vous avez bien voulu soutenir. Ce film produit par la société Marakudja’films, société Martiniquaise de cinéma en court métrage, a été pour nous l’occasion de vérifier « in situ » les conditions particulières de tournage au format 35mm, mais aussi et surtout la situation pour le moins singulière des intermittents Martiniquais du cinéma et de l’audiovisuel.

Il m’apparaît plus qu’important d’attirer votre attention sur la nécessité de soutenir l’activité cinématographique de façon réelle. Il y a une urgence politique à considérer ce secteur comme un secteur culturel à part entière : source d’emploi, de savoir faire, espace de création.

En effet, à l’occasion de nos recherches en personnel technique pour le film, nous avons pu observer que la plupart des techniciens Martiniquais formés aux techniques des métiers du cinéma dans le cadre d’école ou dans le cadre de pratique sur les plateaux de tournage, finissent par déserter leurs postes. La raison invoquée est toujours la même « pas assez de tournage »

Cette situation est grave et pénalise d’autant les conditions de création chez nous. Réaliser un film, court ou long métrage coûtent relativement cher : Les coûts fixes des moyens techniques et les salaires. Et ce, malgré les très belles ristournes qu’un grand nombre de prestataires consentent couramment à faire, afin d’aider les jeunes créateurs. Le film « au nom du père » a pu bénéficier de cette pratique. Il n’aurait jamais vu le jour sans ces magnifiques soutiens.

Un autre paramètre inhérent à notre spécificité îlienne vient grever le budget d’un film de façon exorbitante : le coût du transport du matériel, le coût des hébergements des techniciens venant de l’hexagone, le surcoût de l’immobilisation du matériel du à l’éloignement. A titre d’exemple une caméra normalement louée à Paris deux semaines le sera pour nous 3 voir 4 semaines à cause des contraintes du transport et des contraintes douanières. Ce qui multiplie par 1.5 voir 2 le coût de la location par rapport à une production hexagonale.

Depuis que la tolérance sur le travail non rémunéré n’a plus court (2004), les budgets ont explosé et c’est donc pour cela qu’il faut que les institution soutiennent de façon beaucoup plus importante ce secteur. C’est comme cela que des emplois pourront être créés et les savoirs faire préservés. De plus, comme nous devons compléter nos équipes par des techniciens venus d’ailleurs, à cause de l’abandon de nos équipes locales qui s’épuisent à ne pouvoir vivre de leur passion, nos budgets se trouvent explosés par le coût des défraiements que génèrent ces personnes venues d’ailleurs.

Beaucoup ont espéré s’épanouir dans le cinéma. Beaucoup ont déchanté faute de tournage mais aussi faute de rémunération sur les tournages. Un intermittent doit faire ses heures pour exister ! C’est une cause d’intérêt publique que d’œuvrer à ne plus laisser cette situation de désolation perdurer chez nous. La Guadeloupe et la Guyane se sont déjà engagées sur la voie du soutien à la production cinématographique et audiovisuelle ainsi leurs techniciens travaillent. Que ce soit sur les productions locales ou extérieures.

Il est nécessaire d’encourager et de définir une politique locale en matière de production cinématographique et audiovisuelle. « Au nom du père » s’est tourné à 99% avec des techniciens Martiniquais. Cette situation exceptionnelle est dû à la vigilance de Marakudja’films, une société Martiniquais, où le choix a été fait depuis le début de permettre aux Martiniquais de prendre les premiers postes afin d’acquérir expérience et savoir.

Les productions hexagonales arrivent avec leurs équipes, ce qui ne profite pas à l’expérimentation de nos équipes locales. Les financements régionaux de ses productions ne pourraient-ils comporter des clauses mentionnant une obligation d’un quota de présence technique martiniquaise. Non pas seulement en tant que stagiaire mais aussi en qualité de chef de poste.

Nous renouvelons notre demande récurrente : 1/ la mise en place de procédures claire pour le soutien à la production cinématographique martiniquaise 2/ La signature de la convention de partenariat avec le CNC dans le cadre des aides régionales au cinéma. La Martinique est aujourd’hui la seule région a ne pas s’être engagée sur cette voix. Cette situation pénalise tous les gens du cinéma.

Nous gardons l’espoir qu’un jour, ces procédures seront mises en place, avant qu’il ne soit trop tard ; pour que nous ayons les moyens de laisser aux générations qui viennent des images de nous mêmes réalisées par nous-mêmes et pour que puissent se lever de ces générations là, les réalisateurs de demain dont le pays a besoin pour se dire au monde.

Nous souhaitons pouvoir nous entretenir de vive voix à ce sujet, aussi nous sollicitons une audience pour envisager avec vous, Monsieur le Président, les perspectives en ce domaine pour notre pays Martinique.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos sincères salutations.

Le Président

Olivier Baudot Montézume

(Centre de formation cinéma enregistré sous le numéro 97-970114897 auprès du Préfet de la Région Martinique)