Le n°253 de « Révolution Socialiste », journal du G.R.S. —
Dans sa conférence de presse de retour au pays, le trio de nouveaux députés partis ensemble (Nadeau, Nilor, William) a signalé les 3 sujets qu’ils ont tenu à évoquer en urgence, avec les ministères parisiens : les sargasses, les nominations de professeurs loin du pays, la nécessaire réintégration des personnels non vaccinés. Trois sujets urgents, et on ne peut plus légitimes.
Ils n’ont rien dit d’un quatrième tout aussi réel, et qu’une pancarte leur rappelait le jour de leur départ : notre empoisonnement au chlordécone, le risque du non–lieu ! Ont–ils pensé que « la séparation des pouvoirs » les privait d’interlocuteur ? que le sujet est trop lourd et trop ancien pour donner lieu à une évocation sur un coin de table ? Ils nous diront sans doute ! Toutefois, une chose est sûre : la « réparation » de la catastrophe chlordécone restera au niveau des « miettes » (Letchimy), si la population n’augmente pas la pression et si tout le personnel politique digne ne s’y met pas !
Les propos suivant lesquels il faudrait laisser la justice faire son travail sans s’en mêler, auraient de quoi faire rire s’il ne s’agissait d’un sujet aussi tragique. Qui peut affirmer avec certitude que sans les mobilisations populaires depuis 2018, les ouvrier-e-s agricoles seraient même imparfaitement sortis de cet isolement aggravant leurs souffrances ? ou que les témoignages auraient émergé ? les commissions parlementaires auraient-elles vu le jour ? les « pièces du dossier » auraient-elles refait surface ? Les plans auraient été encore plus rikiki ! L’ « action collective conjointe » n’aurait pas été imaginée ! Les plaintes auraient continué de moisir dans l’oubli ou auraient déjà été enterrées sans tambour ni trompette ! Et, sans vouloir vexer, même le travail des avocats n’aurait retrouvé la vigueur nécessaire !
Nous devons dire ces choses parce qu’elles sont vraies (si nou manti, ki an moun lévé pou di-y !) et que rien n’est plus néfaste que le discours qui prône l’inutilité de l’action des masses ! Cette action connaît des hauts et des bas, prend des formes diverses, charrie le meilleur et le moins bon mais sans elle, ici comme ailleurs, point de salut !
Lundi 27 juin, l’action a pris la forme d’un blocage symbolique et très commenté du palais de justice avec, entre autres, bananiers et sargasses.
Jeudi 30 JUIN, une importante réunion, à l’appel de LYANNAJ POU DÉPOLYÉ MATINIK a fait le point sur l’action collective conjointe (avec l’avocat Christophe Lèguevaques) et le dossier pénal (avec l’avocat Raphaël Constant). Une bonne soixantaine de milirant-e-s ont conclu la réunion sur la nécessité de poursuivre la mobilisation. L’échéance de la fin juin qui avait été donnée est repoussée. Les nouveaux éléments portés dans le dossier pénal et l’appel qui sera fait dans l’action collective conjointe obligent à poursuivre des procédures encore quelques mois qu’il faut mettre à profit.
Des témoignages fondamentaux montrent que l’épandage a continué, même après la fin de la honteuse dérogation, et on connaît les donneurs d’ordre.
Pour la première fois un tribunal (et pas un Politique) reconnaît les « négligences fautives de l’État »! Son refus de décider l’indemnisation des plaignants pour « préjudice moral d’anxiété » est contesté, car contraire à la jurisprudence. La vérité continue de sortir. Nous n’avons d’autre choix que celui d’aller jusqu’au bout ! Nous ne pouvons avoir moins d’entêtement que ceux qui pendant des décennies nous ont empoisonnés pour l’unique dieu du profit capitaliste.
Nous ne cacherons pas que le fléau de la division des forces combattantes plane, comme une menace déjà illustrée par des anicroches regrettables. On sait aussi, que parmi ces forces, on trouvera toujours des acharné-e-s de l’unité des mouvements comme levier de l’action de masse. C’est de ce côté là que se situe le Groupe Révolution Socialiste (GRS).
Vous avez dit congrès des élus ?
La C.T.M. a donc décidé de convoquer un congrès impliquant en plus d’elle même, l’ensemble des maires et des parlementaires de Martinique. Le sujet principal à l’ordre du jour est institutionnel. Nous sourions !
Plus on nous raconte qu’il faut « mettre un terme à la querelle institutionnelle », plus elle se réinvite sur la scène. Cela ne résulte pas d’une lubbie idéologique, d’une obsession abstraite de la question nationale, mais d’un fait têtu : la situation coloniale est un frein pour la prise en charge des problèmes.
On est forcé de questionner le rapport avec le pouvoir français et de chercher des réponses concrètes. Que les élus confrontés au quotidien avec les entraves du système veuillent traiter la question est la moindre des choses. Aucune « alliance de gestion » ne peut contourner cette nécessité.
Mais une question se pose immédiatement : et le peuple dans ce débat ? On envisage sans doute de lui «expliquer », voire même de le «consulter» après ? Et pourquoi ne serait–il pas impliqué dès le début dans un débat qui le concerne au premier chef ? Après tant de « regrets attristés » sur la faible participation aux élections, qui fait de nos élus des majoritaires au sein du quart de l’électorat, comment ne peut–on pas imaginer une procédure qui dépasse pour la population le rôle de spectateurs juste appelés à éventuellement donner un avis sur la question en débat ?
Cette procédure existe. Elle a été formulée par la gauche des colonies, il y a plus d’un demi-siècle. Elle s’appelle l’assemblée constituante. Par là, on entend l’élection au suffrage universel à la proportionnelle intégrale, sans barre contre les petits, sans prime pour les gros, d’une assemblée chargée de travailler sur cette question de fond, tout en gérant en attendant le quotidien.
Par une telle démarche, le débat populaire serait immédiat, les listes exprimeraient clairement aux yeux de la population toute entière leurs positions. Celle-ci par son vote, indiquerait déjà des préférences, et retrouverait le pouvoir de choisir dans un référendum démocratique.
Ainsi on transformerait le conclave prévu en juillet en un véritable évènement historique démocratique.