— Par Christian Antourel & Ysa de Saint-Auret —
Habitation Clément. Jusqu’au 22 juin 2014
Comment qualifier son geste, ses propositions, ses regards ? De présences certainement, quelque chose qui suggère une signification , un mouvement, une séquence inspirant une durée, un récit. Mais de présences qui animent en même temps une évidence en retrait et une énigme éclairant son action dans l’expérience d’une façon de faire presqu’une façon d’être.
Pierre Roy Camille se lance dans cette consistance particulière, inventée, creusée, par un choix artistique qui réactive sans cesse sa définition et sa portée. L’artiste a fait le choix d’intervenir sur et dans des intervalles, qui ne sont pour lui ni des espaces vides, des pertes ou des erreurs. Mais la condition à partir de laquelle il se passe quelque chose. Des possibilités de passages vers l’ailleurs, d’issues hors le vide, d’interventions mettant en relief des facettes différentes de son interprétation. Une intimité partagée, un supplément de sens. Il pointe l’intervalle comme posé sur le réel et permettant des renversements de situations, des dérèglements subtilement organisés, d’où finalement la cohérence n’est pas absente, et porte un éclairage sur son entreprise artistique, sans la réduire à une seule perspective.
Dans la mouvance des gravures romantiques du XIX ème siècle
C’est pourquoi, si dès l’entrée dans galerie, la question qui se pose sur la parole de ces six œuvres présentées est tenace, au moment d’en sortir la
réponse, est proprement jubilatoire. C’est un autre geste qui gouverne l’œuvre de Roy-Camille. Ses travaux s’inscrivent dans la mouvance des gravures romantiques du XIXème siècle. À l’encre, au feutre ou à l’huile, l’expression de ses œuvres murales ou aux dimensions d’affiches ne cesse de s’interroger sur les relations entre le volume et la surface, sur le passage de l’un à l’autre. En un sens cette œuvre se présente comme à rebours de cette tendance de l’art moderne et contemporain qui préfère souvent sa production à la réalité, les signes aux choses, la représentation à la présence. Paradoxalement l’artiste recherche le lieu et son architecture, avec ses volumes, ses aspérités, ses plis, ses ombres, ses pénombres et la transfiguration de celui-ci en une pure surface. On s’aperçoit sur le parcours que le lieu n’est jamais réductible à un simple topo, qu’il est surtout une matrice qui n’en continue pas moins d’exister, de prendre un sens nouveau pour notre étonnement et notre perception.
Notre avis
Des vagues déferlantes agressives devant un ciel nuageux ? Pourquoi un tel soulèvement qui roule et se délite sur un fond rocheux ? Pour se croire un instant revenu à la « Légende des siècles » de Victor Hugo. Puissant est le cri de cette exposition, qui milite en miroir pour une nouvelle vision de la nature dans sa force mystérieuse, si belle dans ses profondeurs exaltées. « magiques »
Pratique :
A l’Habitation Clément. Le François, jusqu’au dimanche 22 juin
Tout public
Entrée gratuite
Informations : 05 96 54 75 51
Texte paru dans France-Antilles
Christian Antourel
& Ysa de Saint-Auret