— Par Eugénie Liber* —
La France a célébré en 2015 les soixante-dix ans de la Sécurité Sociale, mise en place avec les ordonnances d’octobre 1945.
La Sécurité sociale, première grande avancée sociale de la France au sortir de la seconde guerre mondiale est étendue deux ans plus tard aux quatre nouveaux départements d’outre-mer, la Réunion, la Guadeloupe, la Guyane et la Martinique. C’est le décret du 17 octobre 1947 qui consacre cette avancée majeure pour nos territoires et ouvre le droit de tous à la protection de la santé, à la sécurité matérielle, au repos.
Cette étape importante pour les travailleurs a été rendue possible grâce au travail acharné et à la lutte de militants politiques communistes : Aimé Césaire, Léopold Bissol, Georges Gratiant…mais surtout de syndicalistes, au premier rang desquels Victor Lamon qui sera le premier dirigeant de la Sécurité sociale de la Martinique.
Au nombre des premiers acteurs politiques et syndicaux martiniquais de la première heure, qui ont oeuvré avec acharnement auprès des masses laborieuses pour la mise en place de la Sécurité sociale, Philibert Duféal.
La vie de Philibert Duféal est en effet marquée du sceau de l’engagement politique et syndical, et du sceau du combat pour le développement de la Sécurité sociale en Martinique.
Comme son père, militant communiste, membre du premier conseil municipal communiste de la ville de Fort-de-France, élu en 1945 et présidé par Aimé Césaire ; Philibert Duféal jeune charpentier et apprenti de Léopold Bissol, inscrit son engagement politique à la Fédération communiste de la Martinique à laquelle il adhère dès la fin de la guerre. Il mène alors une activité militante dans ces années d’après-guerre, allant par exemple « dans les mornes, les campagnes et les bourgs pour expliquer et défendre les candidatures de Bissol et Césaire aux législatives de 1945 » .
Un combat exemplaire
Au plan syndical, le militant Philibert Duféal est aussi très actif au sein de la CGT. Secrétaire de la section des ouvriers du bâtiment, il est au nombre des militants politiques et syndicaux qui parcourent la Martinique pour convaincre les travailleurs d’adhérer à la Sécurité sociale. La tâche n’a pas toujours été aisée, comme lui-même le rappelait : « Il a fallu se rendre dans les campagnes des 34 communes de l’île pour expliquer l’enjeu. Lamon et moi, nous avons été frappés par la révolte des travailleurs qui ne comprenaient pas et n’adhéraient pas encore au combat pour la Sécurité sociale » .
Avec d’autres militants syndicaux, Philibert Duféal prend, dès lors, une part active à la gestion de la Caisse générale de Sécurité sociale de la Martinique afin de mieux faire entendre la voie des travailleurs et d’oeuvrer en faveur de leurs intérêts. Il est en effet désigné le 24 décembre 1954 par la CGT pour siéger au conseil d’administration de la CGSSM. Il convient de rappeler que la CGSS couvrait étalement les prestations familiales servies aujourd’hui par la Caisse d’allocations Familiales. Il demeure administrateur de la Caisse générale de Sécurité sociale de la Martinique jusqu’au 28 mars 1991, soit 37 ans au cours desquels il n’a eu de cesse de défendre et de porter la voix des travailleurs martiniquais.
Son combat est exemplaire et doit être porté à la connaissance de tous, en particulier des jeunes.
Le Comité d’histoire de la Sécurité sociale récemment mis en place à l’ambition de faire connaître tous les acteurs de la construction de notre système de Sécurité sociale, qui comme Philibert Duféal se sont battus pour le bien commun. Nous avons pour ambition de faire connaître tous ceux qui ont contribué à la construction de notre système de sécurité sociale dans le cadre des travaux du comité d’histoire de la Sécurité sociale que nous avons mis en place en 2015.
* Eugénie Liber, Pour le Comité pour l’étude de l’Histoire de la Sécurité Sociale et de la Protection Sociale. Pour le Conseil d’Administration de la CGSSM