— Par Raphaël Spéronel —
Introduction et présentation de Jacques Chard-Marie-Sainte
La veille du 14 Juillet 1789, oui la veille, tout juste la veille, les paysans sont des Sujets du Roi, la Révolution en fera des Citoyens ! La veille, ce sont des Cerfs, des sous-hommes, écrasés par la Gabelle, incultes et ignorants et cette plèbe ce sont NOS ayeux il y a seulement 3 Siècles, un clignement de cils à l’échelle de l’humanité. Les juifs sont encore bien moins et ils sont apatrides. La Révolution leur donnera l’égalité et la Citoyenneté. Quant aux Noirs encore esclavagisés ce sont les ouvriers de la Commune qui feront la 1ere Abolition et les reconnaitront comme Humains ! Alors il y eut Robespierre et les excès mais ne jetons pas le bon grain avec l’ivraie car avec de tels arguments on en serait toujours à l’arbitraire du Roi. Que dis-je? On en est TOUJOURS à l’arbitraire du …. JUPITER !
Cette correction vaut d’être verbalisée car certains ont la mémoire sélective !
De quoi s’agit-il ici ?
Il s’agit ici du sentiment de dépossession qui sous-tend et qui constitue véritablement le ressort de cette Révolte.
L’État qui depuis l’après guerre se veut Protecteur des Français, en voulant pourtant bien faire, s’est immiscé à un tel point dans la vie des Français de la Conception à l’Ephad (politique de la Natalité, de l’Enfance, pré-scolarité, vaccination, scolarité, jeunesse et sport, Université, couverture Sociale, politique de la ville, plans banlieue etc etc) que ces derniers ont été dépossédés de leur autonomie personnelle, de leurs libertés de choix, de leur Autorité parentale et de leur capacité de se penser comme Acteur principal de leur projet de vie.
Cette Révolte contre la paupérisation de l’impôt au travers la contestation de l’accaparement des fruits du travail c’est surtout une révolte contre cette forme de dictature prédatrice de la Nomenclature d’État. « L’État c’est moi » dit le Monarque.
Ce mouvement des Gilets Jaunes en rassemblant des gens qui subissaient dans un isolement pudique cette violence de la Nomenclature, a créé de nouvelles solidarités et une libération de la parole qui enfante de nouvelles perspectives de construction d’un ordre sociétal nouveau. Les exigences de démocratie directe (Référendum d’initiative populaire) montrent et expriment le besoin d’une réappropriation du pouvoir de décision et dénoncent l’incompétence de la Représentation Nationale ou pour le moins son incapacité à être le relai des doléances de la Nation tout comme les autres corps intermédiaires tels les Syndicats et les organisations politiques qui ont perdu toute légitimité. De nouvelles formes de solidarités seront forgées dans la lutte et l’enfantement d’un rapport nouveau à la Nomenclature.
Jupiter est NU et toute la Nomenclature l’est aussi. Mais dans sa sagesse le Peuple dit que chacun doit être à sa juste place mais dans une relation reformatée où la pyramide est inversée ! Jupiter et la Nomenclature doivent se mettre au Service du Peuple.
Alors oui, il y a des excès, mais en dépit des excès que nous regrettons tous, j’ai choisi mon camp et c’est celui de la Justice. Sans Justice il ne peut y avoir de Paix !
Jacques Chard-Marie-Sainte
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Petit traité de dislocation sociale
— Par Raphaël Spéronel —
Une crise sociale n’est pas une catastrophe, c’est un processus d’achèvement et d’avènement qui procède de causalités multiples qui a un moment donné, convergent vers une situation critique dont la sortie est hautement problématique car on ne gère ni la nébuleuse des faits qui s’est cristallisée en constellation, ni la temporalité du processus, ni les logiques axiologiques qui agglutinent ces évènements dans un chaos social et sociétal.
Les faits sont connus leur agrégation relève d’une alchimie dont le hasard et la nécessité rendent compte des agencements.
Mais actuellement ces faits de ruptures et de rejets des consensus jusqu’ici plus ou moins partagés sociétalement, se combinent dans un niveau symbolique tel qu’ils remettent en cause l’ordre actuel du vivre ensemble et en appel à une révolution par implosion des valeurs communes.
Il a fallu toute la mal-habilité politique de ces dix dernières années pour en arriver là, mais je crois qu’on y est : les prémices d’une dislocation sociale.
Pourquoi visons-nous avant tout la sphère politique, de démocratie représentative, puis finalement toute forme de représentativité. Parce que c’est justement sur elle, du fait de son destin sociétal de prendre les mesures pour éviter ce pire et organiser la chose publique dans le sens de l’évolution partagée ou de l’explosion créatrice…
Or en se succédant dans l’opulence des pouvoirs gagnés à coups de projets et de propos les plus enjoliveurs les uns que les autres, en évitant soigneusement tout inventaire des gouvernances précédentes, les différentes classes et modes de gestion politique se sont auto absout de toute critique dont la démocratie a besoin pour se maintenir. Enfantant un Jupiter, bien esseulé, dans son olympe harcelé et mis à mal dans sa verticalité totémique par l’horizontalité sismique de la horde des gilets jaunes.
La dislocation en réfère à des concepts forts différents de ceux que l’on retrouve dans la fracture sociale, la tendance est nettement plus régressive et le refus des règles du fonctionnement collectif extrêmement fort. « transgression libertaires- sinon liberticides d’un coté – et déni d’autorité de l’autre sont les deux faces d’un même problème qui ne peut être réglé ni par la répression, ni par le laxisme » Guy Laucoin
Quand une société est malade d’elle-même, la seule question qui se pose est relative à la pertinence de ses règles de fonctionnement : la réponse est politique. Ce qui veut dire qu’elle ne relève pas de solutions au coup par coup mais de la recherche d’un nouveau pacte social qui redéfinisse les manières d’être ensemble.
• Le dualisme entre une classe aisée et politiquement entretenue comme premier de cordée disposant d’avantages déséquilibrés face à des classes en voie de précarité et d’exclusion sociale ne tient plus.
• La violence qui s’accroit, de population sans projet et sans avenir est une forme d’adaptation régressive et donc de désespérance qui se retourne contre le lien social, la cohésion sociale et génère une peur déstructurante de l’autre et donc de moi-même, car tout le monde est l’autre (l’hôte) de chacun.
• L’utopie et la vision ont cédé leur place à la précarité et à l’incertitude, comme seuls horizons temporels.
• Le consensus sur des valeurs partagées et un avenir commun est de plus en plus fragile.
Du reste, nos valeurs, nos modes de fonctionnements sociaux, nos systèmes de représentation sont en crise ouverte avec la numérisation, l’hyper consommation, l’individualisation … et les moyens de régulation de « l’être social » sont de plus en plus inopérants.
La radicalisation envahit tous les secteurs d’opposition là où l’on aurait dû trouver du dialogue et du débat démocratique.
Au final, ce n’est pas l’insertion au modèle sociétal qui est en souffrance – l’adaptation du Sujet désirant à son milieu- mais l’intégration sociale qui en est le premier moment – le refus des règles… il faut inventer de nouvelles formes de solidarités, concevoir autrement le travail et l’activité et ce faisant reconsidérer les notions de statut social et de citoyenneté.
Cela signifie qu’il faut élaborer une autre problématique de médiation sociale, comprendre l’individu dans la société d’aujourd’hui et redéfinir l’être collectif dans le cadre d’un ensemble choisi et assumé ensemble.
Ce n’est pas à chacun à faire sa loi mais à la Loi d’être élaborée au plus proche de chacun, en obligeant à une réflexion de fond sur une nouvelle pédagogie sociale qui ne devra pas se laisser enfermer dans la complexification et l’expertisation croissantes des problèmes et des dossiers.
« une tâche qui ne relève pas du simplisme médiatique actuel et de l’activisme politique, car c’est le fondement même de l’action politique qu’elle remet en cause.
R SPERONEL
(In mémorum G. Laucoin).