—- Le n° 303 de « Révolution Socialiste », journal du G.R.S. —
La Martinique progressiste se bat, quoi que disent les pessimistes têtus mais superficiels. Ici, on dénonce les magouilles d’un maire pour son profit personnel. Là, on s’insurge contre une nouvelle atteinte à l’environnement. Ailleurs, on s’en prend au passe- droit pour un gwochiap.
Pendant des mois, des équipes militantes ont accroché leurs chars au combat mené surtout en France, contre le sale coup porté aux retraites des plus modestes au profit du grand capital.
Depuis des années, le combat pour la justice et les réparations des crimes chlordécone a refait surface. La nouvelle configuration électorale dans l’assemblée nationale française (dans les colonies, mais aussi dans l’hexagone) a permis quelques escarmouches partiellement victorieuses (non vaccinés réintégrés, « continuité territoriale »...). Conférences, débats, publications, d’intérêt, de qualité et d’influences très variables, fleurissent.
Si le sentiment de piétinement reste très fort, ce n’est pas sans raison.
Le prochain « comité interministériel de l’outre–mer » ne fait rêver que les acheteurs d’illusions. L’agitation des sénatoriales ne concerne que les professionnels de la politique et les chercheurs de mandats.
L’ambiguïté est à tous les étages : on se donne des frissons d’anticolonialisme en faisant remplacer « métropole » par « hexagone » (en effaçant du même coup le mot « colonie » pour désigner nos pays). On mène un juste combat pour la diminution du prix des billets d’avion, mais au nom du vocable douteux de la continuité territoriale. On peste contre le colonialisme, mais on fricote avec des personnages connus pour leur appartenance à l’extrême–droite, ce qui permet au passage de nier toute signification aux bulletins de votes mis sur le nom de Marine Le Pen. Cette cécité au moment où les crypto, les néo ou les archéo fascismes s’affichent aux quatre coins du globe, a quelque chose de préoccupant.
Le sentiment d’impuissance vient aussi, et peut être surtout, de l’absence d’une grande lutte victorieuse modifiant les conditions d’existence du peuple et recréant l’espoir, renforçant la volonté de se battre ensemble pour autre chose que les reclassements politiciens de l’après Marie-Jeannisme avec de forts relents de bataille des égos et de tactiques carriéristes.
Tout cela contraste avec l’importance des enjeux tant au niveau martiniquais, antillais, caribéen que mondial.
Dans un tel contexte, une énorme responsabilité repose sur les épaules du mouvement ouvrier et populaire de notre pays et d’ailleurs. Il lui appartient d’abord de se reconnaître, de se définir en se démarquant de toutes les forces sociales et politiques qui ne voient d’avenir que dans la perpétuation coloniale et la dictature capitaliste.
Aucun front social et politique progressiste ne mènera de grande lutte sans partir de la réalité des antagonismes de classes qui n’ont cessé de structurer notre société, depuis le premier jour de leur existence.
Cette ligne de démarcation tracée, le débat s’impose entre ceux et celles d’en-bas, ceux et celles qui épousent leur destin pour construire une unité et forger une stratégie de victoire. Cela ne viendra pas d’un coup. Le passif pèse. Les arriérés du débat émancipateur sont de taille. Des décennies de nationalismes bourgeois mystificateurs, de stalinismes faillis, de social-démocraties trompeuses ont obscurci le paysage. Mais toutes ces impasses font que nous ne partons pas de zéro. Il n’est plus temps pour les règlements de comptes nostalgiques.
Parce que nous sommes pressé-e-s, nous devons prendre le temps, au sein même des combats qui n’attendent pas, et qu’il faut prendre avec détermination par tous les bouts où ils se présentent, de débattre pour poser les jalons d’un avenir de justice et de liberté.
Retraites : fin peu glorieuse de la dernière séquence de la mobilisation en Martinique
Sauf rebondissement peu probable, mais impossible à exclure, la mobilisation en Martinique contre la démolition macronienne des acquis du système français de retraite francais, s’achève.
Le mot d’ordre de mobilisation du 6 juin lancé par l‘intersyndicale de France ne semble avoir été relayé que par l’UNSA locale. Aucune réunion intersyndicale ne s’est tenue à ce sujet.
Le mouvement, il est vrai, a toujours été écartelé entre la volonté d’élargir la lutte aux autres grandes revendications du monde du travail chez nous, et les réflexes d’alignement sur le calendrier français, entre la volonté de frapper les centres de formation du profit capitaliste et celle de « bloquer » (circulation ou lieux stratégiques), entre volonté de combiner manifestations de rue et autres formes, ou volonté de s’en tenir à une forme privilégiée de lutte.
Bien évidemment, les problèmes restent entiers, les uns comme dans tous les territoires sous administration française, les autres plus spécifiques à notre pays.
Il est clair que sans une forte volonté des syndicats de mettre les intérêts du mouvement dans son ensemble au–dessus des médiocres calculs de boutiques syndicales, les dominants pourront dormir tranquilles… Jusqu’à l’explosion sociale !